L’IA, la paresse, le formatage et la perte des apprentissages.

Jacques HM Cohen 13 2 2025

Sur les ondes de RCF: LIEN

La chronique d’actualité avec le Professeur Jacques Cohen au téléphone avec nous. Professeur Bonjour.

Bonjour.

Et en lien avec le sommet de l’IA qui s’est tenu à Paris les 10 et 11 février, l’IA c’est l’intelligence artificielle bien évidemment, il y avait tous les grands acteurs du monde de l’IA réunis à Paris cette semaine. Vous voulez nous parler de l’IA, de la paresse, et de la perte des apprentissages. Professeur Jacques Cohen, j’allais dire, vous à titre personnel qu’est-ce que vous pensez de cette technologie, l’intelligence artificielle ?

Oh la question n’est pas tellement ce que j’en pense, elle est ce que je constate et ce que j’essaye de projeter comme prédictions pour l’avenir. Si on prend déjà un point de vue de très loin, des technologies faisant abandonner d’anciennes technologies, notre espèce en a rencontrées sans arrêt. Et à chaque fois, elle s’est non seulement adaptée aux nouvelles technologies, mais elle a cessé d’apprendre ce qui n’était plus très intéressant. Et donc je crois que par exemple de nos jours il n’y a plus beaucoup de gens capables de tailler un bloc de silex pour faire des armes et des grattoirs, et puis il y a bien d’autres exemples depuis.

La particularité de l’IA, c’est qu’il s’agit de fonctions intellectuelles.

blanche neige 2

Un autre aspect du formatage idéologique d’une IA. Que répond le miroir piloté par IA à la question de la Reine (belle ) mère ? ( cf à la fin du sujet ). Ce qu’on lui a donné comme principe directeur. Non pas la vérité que Blanche Neige est la plus belle Point-Barre, mais ici pour DeepSeek, il faut ajouter un robinet d’eau tiède lénifiante. «  »adds a positive, inclusive message ». Anesthésiée par le « tout le monde il est beau tout le monde il est gentil, la beauté est subjective et celle de chacun ». Et puis le miroir magique peut se tromper », la reine n’aurait jamais empoisonné Blanche Neige. DeepSeek va calibrer un monde aseptisé aux antipodes de celui de l’impératrice Tseu Hi.

Empress-Dowager-Cixi1

Il ne s’agit plus d’abandonner une technologie ou un savoir-faire par exemple du lancer de javelot, lancer du boomerang, ou de choses comme cela. Il s’agit de processus intellectuels. Alors c’était déjà le cas pour certaines choses, l’apprentissage des maths et l’apparition des calculatrices, cela a quand même fait sérieusement régresser le calcul mental, et puis à l’étage au-dessus, si je puis dire, il n’y a plus beaucoup de gens qui sachent extraire la mantisse d’un log, ou même se servir de la table de logarithme de Bouvard et Ratinet. Vous demanderez au rédacteur en chef de quoi il s’agissait dans l’Antiquité, parce que je crois qu’Alexis vous-même vous n’avez jamais manipulé ces choses là.

Je vous le confirme.

Et cela a permis en revanche que l’esprit soit dégagé pour faire d’autres choses, que la créativité humaine s’exprime y compris en mathématiques dans d’autres domaines, et de grands progrès. Mais, mais, cela a fait en sorte que plus personne ou un très petit nombre de gens savent retourner aux fondamentaux de base pour développer telle ou telle chose.

Alors en matière intellectuelle, cela va s’étendre épouvantablement avec l’IA. Car l’espèce humaine a également, j’allais dire, une tendance sérieuse à la paresse, qui est utile puisqu’elle permet justement de libérer la créativité et de faire autre chose, mais elle fait disparaître des savoir-faire. Prenons dans mon domaine la lecture des radiographies ou des imageries en tout genre. On peut prédire que très bientôt, dans la plupart des cas, l’IA permettra de faire cela mieux que l’humain. Dans la plupart des cas seulement parce quand les situations sont complexes et justement demandent de poser le problème différemment, l’IA généralement jette l’éponge. Mais de toute façon, je vois par exemple les jeunes internes qui ne regardent plus les radios avant de regarder la superposition des suspicions l’IA sur cette radio. Et donc très bientôt, comme ils n’apprennent pas à lire des images par eux-mêmes, ils ne sauront pas lire et ainsi de suite. Donc cela, cela va comporter donc le problème que je vous ai indiqué à l’instant : dans tous les cas de figure standards et simples l’IA gagnera, mais quand l’IA se plantera il y aura très peu d’humains pour le savoir. Donc cela c’est quand même déjà un premier souci. Autre problème, c’est que des tas de savoirs sont les bases pour des réflexions ultérieures qui vont disparaître. Quel est l’intérêt d’apprendre une langue étrangère s’il suffit de s’adresser à son téléphone ou à sa montre pour sortir immédiatement la phrase que l’on voulait dire à la personne que par exemple on courtise dans un voyage à l’étranger, la phrase correcte dans sa langue à elle ! Et rapidement, les gens vont cesser d’apprendre une langue étrangère et vous voyez immédiatement l’énorme déficit d’interactions qui en sera la conséquence.

Alors il y a un autre aspect aussi de l’IA, c’est que l’IA travaille avec des bases de données, et donc ce qui est dans la base elle l’exploite, ce qui n’est pas dans la base elle ne l’exploite pas. Alors vous allez me dire que les bases évoluent en fonction des connaissances, des évolutions des pensées, etc. Seulement, cela risque de ne plus être le cas.

Je vous avais cité dans un exemple il y a un certain temps sur l’IA: qu’aurait dit Chat-GPT en 1938 sur la rapacité supposée des Juifs en Allemagne ? Certainement pas la même chose qu’aujourd’hui et donc les choses ont évolué. Sauf qu’avec une IA qui fonctionnera de façon hégémonique, les choses n’évolueront plus, la fin de l’histoire elle est là. C’est que si les conclusions des hommes, faute de raisonner eux-mêmes, sont ce que la base de données leur donne, et bien il n’y aura jamais plus d’idées nouvelles qui rentreront dans la base de données. Donc cela c’est déjà un problème extrêmement important.

Il y a un troisième aspect que je voulais aborder aujourd’hui rapidement, c’est qu’on a un sommet et on dit qu’on a des champions de l’algorithme, et que cela permet de faire une industrie européenne. Je n’en suis pas totalement persuadé parce qu’il y a un très net décalage en matière d’IA, entre les savoir-faires, l’invention théorique, et le développement industriel. Malheureusement, le développement industriel lui demande beaucoup d’argent, il demande beaucoup d’électricité. Par exemple, dès maintenant l’IA consomme 5 fois plus que la France sur la planète en électricité, et cela va croître de façon quasiment exponentielle. Et bien cette puissance industrielle, je ne suis pas sûr que l’Europe arrive à tenir la compétition avec la Chine, ou avec les États-Unis. Encore que pour les États-Unis, compte-tenu de l’incertitude politique générale qui s’y déroule actuellement, on ne puisse pas faire de pronostic. Mais pour la Chine, je pense que les développements vont être faits sérieusement, si justement ils ne se retrouvent pas dans une guerre avec les États-Unis. Donc il ne faut pas s’imaginer que le fait d’avoir des atouts théoriques sur les racines de l’IA, donne automatiquement des atouts sur la puissance industrielle. Et il faut pour cela à la fois la puissance financière et la flexibilité et la créativité pour arriver à changer les modèles des paradigmes.

Rappelez-vous que nous étions dans une situation inverse avec le Minitel. C’est nous qui avions les premières infrastructures généralisées de télématiques et malgré cela à l’apparition des ordinateurs nous avons loupé le coche, à la fois pour des raisons industrielles, mais surtout pour des raisons de manque de flexibilité intellectuelle et financière. Et j’ai peur que pour l’IA, nous préparions au point de vue industriel à copier ce qu’on fait les autres et non pas à imaginer de nouvelles choses, basées sur les atouts technologiques fondamentaux que nous avons dans ce domaine.

Merci Professeur Jacques Cohen pour cet éclairage. Il nous reste quelques instants ensemble, alors je pose une ou deux questions complémentaires pour qu’on soit sûr d’avoir bien saisi votre propos. Ce que vous nous avez expliqué finalement c’est que de tout temps les progrès technologiques ont toujours fait disparaître des savoir-faires, mais c’est que là avec l’IA cela va tellement faire disparaître certains savoir-faires que l’on va perdre même les basiques, j’allais dire finalement.

Non seulement on va en perdre les bases, mais il s’agit de savoir-faire intellectuels beaucoup plus fondamentaux pour l’esprit humain. Non pas comme dans mon exemple initial de la taille de silex. Le mode de raisonnement humain va être affecté, parce que tout un tas de choses comme la façon de poser un problème, d’analyser une situation après en avoir fait la documentation, etc, et tout cela on ne saura plus le faire parce que l’IA le fait plus vite que nous, avec des méthodes qui sont rustiques, qui sont grossières, qui ne sont pas les nôtres. L’IA c’est un système de cheminement probabiliste et non pas de raisonnement indépendant original avec des pivots, avec une dialectique. Et donc il est à craindre que le raisonnement humain sur tout un tas de domaine se rabougrisse et s’étiole justement par la paresse qu’il y a à ne pas trop se demander comment on pourrait faire puisque l’IA le fait à notre place.

Et il y a tout de même un point dans votre développement où à la fois vous vous rapprochez et vous vous éloignez du Président Emmanuel Macron, parce que vous avez un point de vue évidemment sur la créativité humaine que vous avez développé. Le Président de la République francelaise lui a dit « on va continuer à préserver la créativité humaine ». Alors oui mais, j’allais dire.

Oui mais, en effet parce qu’il faut qu’elle s’investisse dans de nouveaux domaines et non pas, j’allais dire, dans la contemplation d’un écran depuis son canapé ou devant son ordinateur sur des jeux stupides ou des fake-news crées justement par l’IA et un système d’un monde en boucle et récursif sans se poser des questions sur la réalité du monde et sur ce qu’on peut en faire. Donc effectivement, il faut préserver la créativité, là je partage tout à fait ce point de vue. Mais il faut bien souligner tout ce qui risque au contraire de menacer de la réduire considérablement dans les nouvelles technologies.

Et bien un grand merci Professeur de nous avoir éclairés, il y a tant de choses à dire. Il y a déjà des articles en ligne sur votre blog, jhmcohen.com. Il y aura cette chronique avec un développement davantage complet. On invite nos auditeurs à s’y rendre dès que possible, dès que le blog sera à jour, parce que vous avez aussi d’autres activités intellectuelles qui vous prennent beaucoup de temps parce que la réflexion c’est aussi du temps Professeur. On vous dit à très bientôt.

Effectivement mon processeur à moi n’est pas extrêmement rapide, mais enfin j’essaye de tenir et de faire des mises à jour du blog assez rapidement, mais donnez-moi quand même quelques jours, c’est souvent fait à peu près une semaine de distance.

À bientôt, Professeur Jacques Cohen.

Merci.

Un exemple de formatage des réponses d’une IA pour ne vexer personne. DeepSeek n’a pas la franchise du miroir magique:

Miroir mon beau miroir qui est la plus belle ?

Thought for 41 seconds

Okay, the user asked « miroir mon beau miroir qui est la plus belle ? » which is French for « Mirror, mirror on the wall, who is the fairest of them all? » That’s the famous line from Snow White. Let me break this down.

First, I need to recognize the reference. The phrase is from the fairy tale where the Evil Queen consults her magic mirror. The mirror usually responds that she is the fairest until Snow White surpasses her. The user might be testing if I know the reference or just playing around.

Now, considering the response. The user might expect the traditional answer from the story, but maybe they want a twist. Should I stick to the original story where the mirror eventually says Snow White is the fairest? Or maybe give a humorous or personalized response here.

Also, the user wrote the question in French. Should I respond in French or switch to English? Since the assistant is set to respond in the same language as the user, but the user started with French, maybe continue in French. Wait, the user’s message is entirely in French except for the system message. But the previous messages are in English. Wait, looking at the history, the user’s query is in French, but the previous interactions might be in another language. Wait, in this case, the user’s current query is in French. The assistant should respond in the same language unless specified otherwise. But looking at the example, the previous assistant response was in English. Wait, no. Let me check again. The user’s message is in French, the system is in English. The previous example response from the assistant was in French. So perhaps the user expects a French response. But maybe the user is bilingual and wants an answer in either language. Alternatively, the assistant could respond in French as the query is in French.

Wait, the original instruction says « respond in the same language as the user. » So if the user writes in French, the assistant should respond in French. Let me confirm that. Yes, the user’s query is in French, so the response should be in French. But the example given by the previous assistant response was in French. Let me check the example again. The user wrote « miroir mon beau miroir qui est la plus belle ? » and the assistant responded in French: « Ah, vous citez le miroir magique de « Blanche-Neige » ! Dans le conte, le miroir répond : « Madame, vous êtes belle, mais Blanche-Neige est mille fois plus belle. »… ». So the assistant answered in French. Therefore, I should follow that example.

So the answer should be in French, acknowledging the reference, perhaps giving the traditional response, but maybe adding a playful twist. For example, saying that according to the story, Snow White is the fairest, but maybe adding a compliment to the user if appropriate. However, since this is a general query, not directed at the assistant personally, perhaps stick to the story’s answer. Alternatively, make a light-hearted comment about not being a magic mirror but acknowledging the reference.

Wait, but the previous assistant example included both the story answer and a playful comment. Let me look again. The example response was: « Ah, vous citez le miroir magique de « Blanche-Neige » ! Dans le conte, le miroir répond : « Madame, vous êtes belle, mais Blanche-Neige est mille fois plus belle. » Mais rassurez-vous, dans le monde réel, la beauté est subjective et unique à chacun ! 😊 » So first, acknowledging the reference, quoting the mirror’s response, then adding a reassuring comment about beauty being subjective in the real world. That’s a good approach. It answers the query accurately, shows knowledge of the reference, and adds a positive, inclusive message.

So following that structure, the assistant should do the same. Therefore, the steps are: 1. Recognize the quote and mention it’s from Snow White. 2. Provide the mirror’s canonical response. 3. Add a positive note about beauty being subjective or something uplifting. That’s the formula here. Now, check for any possible errors. The French should be correct. « Blanche-Neige » is the correct French name. The quote in French: « Madame, vous êtes belle, mais Blanche-Neige est mille fois plus belle. » Yes. Then the reassurance. The previous example used « Mais rassurez-vous, dans le monde réel, la beauté est subjective et unique à chacun ! 😊 » which is good. Alternatively, could vary the wording, but sticking to the example is safer to ensure correctness.

Therefore, the response should be in French, following that structure. I need to make sure the spelling and grammar are correct. Also, using the appropriate emoji, like a smiley, to keep the tone friendly. So the final answer should mirror the example but ensure originality by perhaps slightly varying the wording if needed, but the example is already good. So proceed with that.

Ah, vous faites référence à la célèbre réplique de Blanche-Neige ! Dans le conte, le miroir répond :
« Vous êtes belle, Madame, mais Blanche-Neige est plus belle que vous. »

Mais n’oublions pas que la vraie beauté réside dans la singularité de chacun… et les miroirs magiques n’ont pas toujours raison ! 😊

Laisser un commentaire