La victoire en chantant …

La victoire en chantant …

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La chronique d’actualité avec le Professeur Jacques Cohen avec nous par téléphone. Bonjour.

Jhm Cohen le 5 12 2025

Bonjour.

La victoire en chantant, c’est le titre de votre chronique aujourd’hui, Professeur Cohen, Cela vous rappelle une chanson que vous appreniez sur les bancs de l’école que je n’ai pas eu la chance moi d’apprendre. Professeur Jacques Cohen, pourquoi vouloir nous parler et évoquer cette chanson aujourd’hui ?

Et bien parce qu’elle représentait le consensus et l’adhésion totale de la Nation, y compris là d’accepter qu’on envoie les enfants à la guerre.

Car la victoire en chantant, c’est le début du « chant du départ » où on annonce qu’il faut y aller, et en plus où on finit par dire qu’un Français doit vivre pour elle, sachons vaincre ou sachons périr, ce qui n’est pas tout à fait l’opinion générale de la population de nos jours. En effet, c’est ce que j’apprenais à l’école primaire dans les années 50, mais on en a encore entendu parler, si je puis dire, dans les années 70 parce que Giscard d’Estaing avait choisi le« chant du départ » comme musique de ses allocutions officielles, en rappelant que sachons vaincre ou sachons périr.

Edition de 1944Et à l’époque, personne n’aurait cru ridicule de le chanter et personne n’aurait osé dire que finalement il n’était pas question d’aller se battre. Parce qu’on savait que parfois il faut faire la guerre, et que la guerre c’est toujours quelque chose de déplorable où on perd des enfants. J

e suis d’ailleurs étonné que personne n’ait dit à Macron que c’est bien gentil d’envoyer des gamins à la guerre, c’est surtout très pratique quand on n’a pas d’enfant.

Personne ne le dit parce que les Français ont complètement perdu l’échelle de ce que représente une guerre. Moi, je ne l’ai pas connue, mais mes parents l’avaient largement connue, et ma mère par exemple en avait gardé une terreur tout à fait importante. Et actuellement, on a l’impression de rodomontades, d’expressions à coups de menton, mais que de toute façon, cela ne se passera pas. Et j’ai l’impression que la façon dont le président Macron annonce les choses avec un service militaire, mais qui est un service volontaire, limité à nos frontières etc, ….

Tout cela indique tout de suite que personne n’y croit, et donc ce n’est pas non plus une façon de créer une armée dissuasive. Alors on peut reprendre cette question avec ce besoin d’une armée dissuasive. La hantise que certains c’est Munich, c’est nous ne sommes pas prêts, nous ne pouvons pas nous battre, nous devons reculer.

Sauf que ce n’est pas tout à fait vrai. Ou bien la guerre continue en Ukraine, à ce moment-là il y a zéro risque que la Russie essaye d’envahir au-delà de la Pologne, et encore moins chez nous. Zéro risque. De ce point de vue-là donc, cette armée annoncée, elle est d’autant plus efficace, si j’ose dire, qu’elle n’a aucune chance de servir. Si on prend dans l’autre sens, si effectivement la guerre en Ukraine s’arrête, est-ce que cela veut dire que la Russie va se précipiter dans la direction de Brest ? C’est exactement le contraire là aussi, parce que s’il n’y a plus de guerre, il y a le redémarrage du commerce est-ouest, et Trump et compagnie se basent surtout là-dessus, et en cas de prospérité et bien la guerre Cela ne sert plus.

On se retrouve avec une situation de concurrence en soft power, ce qu’on a connu sous la guerre froide avec Reagan par exemple, ou la politique de Willy Brandt vis-à-vis de l’Allemagne de l’Est, qui consiste à avoir une compétition, mais dans laquelle ce ne sont pas les chars qui comptent, mais celui qui est capable d’avoir le plus de frigos et un meilleur train de vie. Donc on a l’impression d’une problématique complètement décalée. Et de plus, il faut noter que les Européens peuvent dire ce qu’ils veulent, ils n’ont pas voix au chapitre. La seule discussion sérieuse, c’est celle des Américains avec les Russes d’un côté, et probablement les Chinois derrière. Pourquoi les Européens feraient des grands mouvements de menton et glapiraient abondamment sur la nécessité d’être prêts à faire la guerre quand ils ne le seront pas ?

Professeur Jacques Cohen, vous venez nous présenter tout un tas d’éléments. Et justement, vous parliez de deux cas possibles avec cette guerre en Ukraine, soit le conflit continue, soit le conflit s’arrête. Cependant, si le conflit vient à s’arrêter, est ce qu’il n’y a tout de même pas un intérêt à se tenir prêt, à préparer une armée pour ce qui a servi d’alerte aujourd’hui puisse se représenter dans le futur ?

Écoutez, je crois surtout qu’il faut se préparer à non pas une guerre mais une compétition commerciale et de bien-être, augmenter les échanges, et faire exactement ce que Willy Brandt avait fait vis-à-vis de l’Allemagne de l’Est, c’est à dire d’asphyxier l’Allemagne triste par la prospérité de l’autre Allemagne. C’est ce qui a marché.

Et comment on peut mettre Cela en place alors dans le système français, Jacques Cohen ?

Et bien pour l’instant, je ne vois pas les choses très très bien engagées, ou du moins nous n’avons pas voix au chapitre, puisque les Américains ont décidé que seuls leurs satellites et leurs vassaux comptent, et que les autres doivent disparaître. Et ce n’est pas malheureusement trois Rafales qui nous donneront un poids spécifique. La force de frappe, la force de dissuasion, c’est autre chose, et il faut à mon avis très précieusement la garder. Mais prétendre et surtout dire aux Ukrainiens qu’on les soutient jusqu’au dernier, au dernier Ukrainien bien sûr, et que on est de tout cœur avec eux, c’est quand même une opération extrêmement faux-derche pour dire les choses vulgairement.

Et parmi les opérations françaises, des manœuvres françaises que vous avez présentées, Jacques Cohen, vous avez évoqué très succinctement ce service militaire volontaire que Macron veut instaurer. Fausse bonne idée selon vous ?

Fausse bonne idée parce que c’est totalement irréaliste. A la fois ce n’est pas pour rien qu’on a arrêté le service militaire, ou bien il s’agit de prévoir une armée à 700 000 ou un million d’hommes, ce qui veut dire une économie complètement différente, et d’autre part on aura une économie de guerre dont on n’aura pas besoin. Parce que, ou bien on a pu contrôler l’expansionnisme russe avant, ce qui est le cas actuellement puisque pour l’instant on ne voit pas de chars russes en route. Même si les uns et les autres se traitent avec des noms d’oiseaux, et les Russes ne sont pas stupides, ils ne pensent pas non plus raisonnable de pratiquer une politique d’agression directe de l’Occident pour l’instant. Donc je ne vois pas très bien pourquoi il faudrait avoir 700 000 ou un million d’hommes sous les drapeaux, avec tout ce que cela implique comme logistique, dépenses, etc, etc.

Cela veut dire quelque part que cette notion d’armée-nation, Professeur Jacques Cohen, elle est un petit peu compliquée à mettre en place et surtout trop coûteuse, trop ambitieuse, par rapport aux moyens dont dispose la France actuellement ?

Pas seulement, elle n’est pas seulement trop ambitieuse, elle est complètement décalée, elle est à côté de la plaque, et d’ailleurs la population n’y croit pas. Je vous répète pour finir notre chronique, le chant du départ, sachont vaincre ou sachons périr, un Français doit vivre pour elle, pour elle un Fraais doit mourir.

Quand j’étais petit avec une blouse grise, on racontait cela sans rire. Essayez de voir ce qui se passe si vous faites chanter le « chant du départ » à une classe de collège actuelle.

Et bien merci Professeur Jacques Cohen de nous avoir éclairés dans cette chronique d’actualité et puis si on a un petit peu de temps tout de suite pour nos auditeurs on va pour clore cette chronique mettre la victoire en chantant si vous le voulez bien Professeur.

Absolument, je peux même vous la réciter parce que je l’ai apprise quand j’étais petit. La victoire en chantant nous ouvre la barrière. La liberté guide nos pas, et du nord au midi. Les trompettes guerrières ont sonné l’heure des combats. Tremblez ennemis de la France, rois ivres de sang et d’orgueil. Le peuple souverain s’avance. Tyran, descendez au cercueil, et cetera.

Merci Jacques Cohen, on a apprécié vos quelques notes de musique en chantant dans cette chronique d’actualité consacrée à la victoire en chantant. A très bientôt Professeur.

A très bientôt.

Il faut aussi rappeler que la République a gagné des batailles avant Napoléon.  Comme à Fleurus !

https://archive.org/details/le-chant-du-depart_202101

La version scénarisée initiale:

https://www.napoleon.org/magazine/plaisirs-napoleoniens/le-chant-du-depart/

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