Jacques HM Cohen 8 10 2023

Sur les ondes de RCF:LIEN

En 1998, le ministre russe Eugène Primakov, ancien du KGB, né à Kiev, qui avait vécu son enfance dans le Caucase du sud, a expliqué en vain aux arméniens alors victorieux depuis 1994, ayant envahi plusieurs provinces d’Azerbaidjan pour rattacher et sécuriser le Haut Kharabagh, qu’il fallait négocier et faire la paix entre Bakou et Erevan. Sinon, un jour dans 10 ans, dans 20 ans, dans 30 ans, leurs ennemis trouveront la faille et le rapport de force pour reprendre par les armes ce qu’ils avaient perdus et sans doute pousser leur avantage au delà. C’est très exactement ce qui s’est passé, dans le délai prévu. J’avais prévu d’en faire un avertissement pour Israël dans ma chronique de cette semaine. Le Hamas s’en est chargé avant moi.

La leçon peut aussi valoir pour d’autres pays ou chaque camp compte sur la victoire ou sur une guerre perpétuelle. La guerre durable est pourtant un facteur de décomposition interne à long terme, même si elle est bien commode à court terme en politique intérieure, et pour faire des affaires…. Les faits nouveaux peuvent être une innovation militaire, les drones aujourd’hui, autre chose demain. Les longues sarisses des phalanges  macédoniennes du temps d’Alexandre le Grand. Mais son empire n’a pas survécu plus de dix ans à sa victoire sur Darius. Ou un changement de rapport de force parmi les puissances alliées de l’un ou l’autre belligérant.

Israël ou les occasions manquées

Pour revenir à Israël, le choix d’une guerre perpétuelle avec ses voisins contre celui d’une paix qui permette une hégémonie régionale par le soft power économique a été fait à plusieurs reprises. Par Ben Gourion en prétendant le contraire, en choisissant en 1970 d’appuyer le royaume de Jordanie qui a viré les palestiniens vers le Liban, plutôt que de les laisser prendre le pouvoir et obtenir un état en Cisjordanie. Lors des accords d’Oslo. A la mort d’Arafat. Au contraire, il a été choisi de laisser Gaza dériver vers les extrémistes assassins pogromistes d’hier, partisans de l’anéantissement de l’état d’Israël par l’extermination de sa population. en se disant qu’ils en seraient bien incapables…

Et d’affaiblir régulièrement le Fatah puis l’autorité palestinienne pour grignoter la cisjordanie.

La politique actuelle de paix avec les pays du Golfe n’en est pas un changement. Il s’agit de faire la paix avec des puissances régionales non limitrophes et non avec ses voisins, ni de faire une place aux palestiniens.

Vive le soft power pour gagner les guerres sans les livrer !

Il est de bon ton de faire passer Merckel et Schröder pour des bisounours naifs ayant préféré faire des affaires avec la Russie. La politique de soft power a pourtant été menée avec succès par Willy Brandt vis-à-vis de l’Allemagne de l’Est et de la Hongrie. Et au fond, par Reagan lui même qui a mené la guerre froide sans la laisser réchauffer outre mesure.

On peut voir combien la guerre perpétuelle corrode de l’intérieur et fracture les États et leur société, qu’il s’agisse d’Israël, de l’Iran, de la Russie ou de l’Ukraine depuis 2014, comme de l’Arménie, où les jusqu’au-boutistes irresponsables du Karabakh ont précipité la catastrophe. La guerre perpétuelle est aussi une drogue économique, déséquilibrant chaque pays cité pour l’empêcher de pouvoir s’en passer.

Que peuvent faire les israéliens après le pogrom du Hamas ?

Hélas pas grand chose de décisif immédiatement, sauf d’exterminer les pogromistes. Car faire émerger des solutions politiques démocratiques parmi les palestiniens dans l’état actuel de leur société tiendrait à faire passer pour réalisme terre à terre, les annonces d’E Musk de colonies sur mars. Le moins irréaliste pour cela serait d’admettre les palestiniens parmi les arabes israéliens qui sont entré dans le jeu politique local en apprenant d’ailleurs très vite les bonnes comme les mauvaises habitudes du monde politique israélien. Autant dire que ce n’est pas demain la veille….

Et chez nous ?

Quand on massacre des civils, femmes enfants vieillards, les yeux dans les yeux, parce qu’ils sont juifs en criant « dieu est grand », cela s’appelle un pogrom. Quand on nous massacre, cela me rappelle que je suis juif.
Quand ces individus vont faire des émules en France, il faudra les mettre hors d’état de nuire, ici comme n’importe où sur la planète. Cela n’a rien à voir avec Israël ou la Palestine.
Les pogromistes ne sont d’ailleurs pas des musulmans: profaner le corps dénudé d’une femme juive en la considérant comme une charogne animale est strictement prohibé par la loi musulmane, qui permet d’ailleurs aux musulmans d’épouser des femmes juives comme religion du Livre.
Il faut montrer les images des horreurs pour montrer ce que sont ceux qui les perpètrent. Aujourd’hui comme hier.

Shani Nicole Louk à Gaza: https://twitter.com/i/status/1710769974778769698

Un point critique sera de ne pas tolérer le maintien dans la vie démocratique des groupes ou partis qui soutiendront l’action du Hamas ou de futurs imitateurs. L’apologie du terrorisme est un délit, qu’il faudra réprimer sans faillir. Le mouvement « Palestine vaincra », dont la dissolution avait été été suspendue par le conseil d’État, devrait servir de premier exemple, par l’arrestation de ses dirigeants, après son soutien hier à l’action du Hamas.

Ensuite il faudra trouver une solution pour un état palestinien afin d’assécher là-bas un vivier du terrorisme. Qui n’est hélas pas le seul. Mais il ne faut pas absoudre les barbares en se réfugiant derrière la recherche des causes de leur barbarie. Les pogromistes et quiconque les approuve doivent être mis hors d’état de nuire, partout.

Un vestige d’une gauche israélienne disparue, les Kibboutzim de Netiv

Bien loin des colons extrémistes de Cisjordanie, une pensée particulière pour le Kibboutz de Netiv Ha Asara. Qui sur son mur de protection et son poste de garde à moins de 1500m de Gaza a maintenu contre vents et marée un message de paix « path to peace » et « bienvenue à Netiv » en hébreu et en arabe, surmonté d’une colombe. Les assassins du Hamas y ont tué 15 personnes, toutes civils.

La prise de position de Joann Sfarr, que je partage