Jacques HM Cohen 15 08 2024
Bientôt sur les ondes de RCF: LIEN plus tard…
Ce sujet tente d’expliquer les données du problème à un public non spécialisé, éventuellement même à des décideurs par définition incompétents. Seule au monde, la Suède prend ses décisions dans un conseil de spécialistes dont les avis sont aveuglement suivis par le pouvoir politique….
Après une épidémie d’un clade de Mpox à transmission par effraction muqueuse ayant contaminé essentiellement des homosexuels masculins en 2022, une épidémie d’un autre clade de plus forte contagiosité par contacts non sexuels de proximité touche en RDC plus de 15000 personnes ? Sa mortalité est bien élevée que celle de l’épidémie précédente, globalement de 3 %, en fait de 1 à 10 %% selon l’âge. L’arrivée en Europe de cette souche n’est qu’une question de temps. L’ampleur de ses foyers est imprévisible et les mesures envisagées par les pouvoirs publics d’une grande imprécision sont essentiellement calquées sur l’épidémie précédente alors que la seule chose certaine est que la dynamique épidémique de la souche actuelle ( clade 1 ) sera très différente.

structure caractéristique d’un Pox virus en microscopie électronique en 1975. Avant l’ère des images « améliorées » par prédiction graphique et IA
On peut envisager schématiquement deux évolutions possibles : a) une installation rampante d’emblée endémo-épidémique avec des cas sporadiques évoluant parfois en foyers. Dans cette hypothèse le virus s’installe pour longtemps.
b) des foyers explosifs d’extension rapide qui ne céderont qu’aux mesures d’isolement strictes, bien au-delà de ce qui a été fait pour le covid. Lors de la dernière épidémie de variole en France à Vannes en 1955, les patients ont tous été mis en isolement hospitalier strict et le personnel soignant, lui-même confiné dans l’enceinte hospitalière pour trois semaines pour ne pas ramener le virus à la maison. Avec stérilisation intégrale du moindre vêtement et destruction des revues et journaux dont l’un ayant échappé au feu a conduit à une résurgence en maison de retraite. Les pox sont en effet très résistants un fois desséchés, pour des années, des siècles et peut-être des millénaires….
L’hypothèse a) semble plus probable car si la contagiosité de la souche paraît très supérieure à celle de l’épidémie précédente, elle ne paraît pas encore atteindre celle de la variole historique.
En RDC ( république démocratique du Congo ) et en pays du Nord
On peut gloser sur des enfants en moins bonne condition et sur les structures de soins disponibles en Afrique pour attendre moins de casse infantile chez nous. Mais la principale différence est l’absence en Afrique de la population d’immuno-déprimés liés aux thérapeutiques anti cancéreuses, de transplantation d’organes ou de maladies auto-immunes que le virus rencontrera en pays du nord. On peut y craindre une mortalité dévastatrice de 30 à 50 %.
Prendre de la hauteur ou la notion de niche écologique.
Parmi les Poxvirus, il y a eu pendant des millénaires un virus particulier, ne contaminant que l’espèce humaine. Les Pox passent en fait facilement d’une espèce à l’autre, sauf cette variole qui a tenu en respect hors de notre espèce les autres Pox sauf cas sporadiques. La vaccination ( avec un pox moins méchant dit vaccine dont l’hôte le plus courant était la vache ) a permis l’éradication de « notre » Pox, la variole. Dont le dernier cas a été détecté en Somalie en 1977. Comme le vaccin n’était pas dénué d’effets secondaires, la décision à mon avis erronée, a été prise de cesser cette vaccination en 1972 aux USA en 1980 en France puis partout dans le monde, selon les recommandations de l’OMS. Une fois la population humaine renouvelée par des sujets non vaccinés, la niche écologique que notre espèce représente pour tous les autres Pox, s’est trouvée libre. Et il n’est pas étonnant que ce soit un Pox de l’espèce la plus proche de nous qui frappe à la porte.
La vaccine, les vaccins et leur immunité
Le vaccin historique était efficace la vie durant avec une administration avant 2 ans et un rappel vers 10 ans. Pourquoi avant 2 ans ? Car hélas, son taux d’effets secondaires augmente spectaculairement ( 10 à 50 fois plus ) chez l’adulte. Ce qui conduit tout de suite à un dilemme : s’il fallait revacciner en catastrophe toute la population adulte du globe, on pourrait attendre une mortalité et des séquelles non négligeables avec une encéphalite pour 1000, des séquelles pour 10 000 et une mortalité supérieure à 1/50 000. De plus, la population la plus vulnérable, les immuno déprimés ne serait pas vaccinable. Car la mortalité de ce vaccin vivant y rejoint presque celle de la maladie elle-même avec 50 % de mortalité comme les essais d’utiliser un pox atténué pour les premières tentatives de vaccin contre le sida il y a 40 ans nous l’ont appris.
On a bien sûr essayé de faire des vaccins mieux tolérés. Tout d’abord les vaccins tués ont une efficacité très relative et très brève car la vaccination anti Pox nécessite d’induire une forte immunité cellulaire. Le vaccin de Bavarian Nordic développé en petites quantités dans la perspective d’enrayer une diffusion terroriste ou militaire, est un vaccin vivant non ou peu replicatif. Son efficacité semble médiocre. On dit pudiquement qu’il atténuerait les formes graves. Les tentatives d’enrayer la diffusion de la souche de virus à transmission sexuelle par une vaccination du cercle de contact en 2022, n’ont pas conduit à une démonstration franche d’efficacité de cette méthode avec ce vaccin. Ce vaccin demande au moins 3 semaines un mois pour obtenir une immunité, qui d’ailleurs ne durera que quelques semaines ou mois. Au bout d’un an il n’en reste pas trace. En fait, c’est la douleur extrême des lésions génitales qui a conduit à une sage abstinence, interrompant la transmission.
Et les médicaments ?
Il y a un antiviral efficace in vitro qui vient d’être testé sur l’épidémie africaine. Aucune réduction du délai de guérison. Ce qui fait penser qu’il faut en chercher d’autres.
Que faire ?
La difficulté est que les contours de cette épidémie restent imprécis. Mais on peut aussi prédire que la suivante rejoindra bien plus le profil variolique historique.
= Refaire du « vieux » vaccin. A l’arrêt de la vaccination, nous avions mis de côté 80 millions de doses qui si elles n’ont pas été jetées ont de bonnes chances d’être restées actives. Les contrôles de qualité des années 80 pour ne pas transmettre d’autres agents infectieux ou éléments de la culture cellulaire n’en sont plus au goût du jour. Il conviendrait de refabriquer en urgence du « vieux » vaccin à la propreté « moderne. Ce qui ne veut pas dire qu’il faudrait automatiquement s’en servir. Mais nous aurions cette possibilité pour parer aux hypothèses les plus pessimistes.
= Préparer des infrastructures d’isolement des malades et quarantaine du personnel soignant.
= Développer et étendre à échelle de masse des tests minute diagnostiques de terrain.
= Travailler à de nouveaux vaccins !
En effet, les essais de nouveaux vaccins basés sur d’autres vecteurs vivants, ou sur des protéines tuées avec usage de divers adjuvants visant une immunité cellulaire rencontrent chacun des obstacles. Non détaillés ici dans un sujet « grand public ». Un seul exemple, l’immunité anti Pox du vaccin historique est très large et protège de tous les Pox. Il n’est pas certain qu’en immunisant contre une seule protéine, on ne retrouve pas les soucis de largeur de la couverture vis-à-vis de souches différentes.
Une mention spéciale néanmoins pour les vaccins mRNA, faciles à développer rapidement à large échelle comme le sars-cov 2 l’a prouvé. Dans les configurations d’emballage lipidique actuellement utilisées, ils n’induisent que peu ou pas d’immunité cellulaire, leur prédisant une efficacité médiocre ou nulle avant de nouveaux développements de leur formulation.
Au travail !
Louis XV est mort de la variole qui ne tuait pas que des enfants mais aussi des adultes non immunisés qui lui avaient échappés auparavant:

Louis XV, mort de la variole à 64 ans
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