« Dessine-moi un mouton » dit le petit Prince diabétique…..

Chronique du vendredi 23 février 2018

Sur RCF: https://rcf.fr/embed/1763409

 

Jacques Cohen, re bonsoir !

Re bonsoir !

Alors, c’est vrai que l’on a parlé du mouton tout à l’heure. Vous avez un titre un peu particulier pour votre chronique d’aujourd’hui.

Oui, la chronique s’appelle « Dessine-moi un mouton », et c’est un Petit Prince diabétique qui en parle.

Alors, vous êtes médecin, donc il y a certainement un rapport entre le mouton et le diabète, mais je ne vois pas trop pour l’instant… alors, il semblerait tout de même qu’il y ait dans le domaine de l’innovation, de la recherche, des cellules souches humaines qui pourraient être mises dans un mouton, mais où va-t-on Jacques Cohen ?

Eh bien, où va-t-on ?… c’est que l’on essaye de soigner les diabétiques, et il faut détailler cette expérience parce qu’elle est vécue dans l’opinion publique plus comme un fantasme d’apprenti sorcier de mettre une tête d’homme sur un mouton ou l’inverse, de mettre des doigts à la place des sabots ou n’importe quoi…

Ce n’est pas tout à fait cela…

Il n’y aucun risque de ce genre, et il faut regarder ce qui a été fait.

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Embryon au stade blastula ( Oursins ).

On a pris un mouton dans lequel on a bloqué les cellules qui doivent donner le pancréas, et on a pris des cellules souches humaines, mais pas à n’importe quel stade. Quand vous prenez les toutes premières cellules, si vous les coupez en deux et bien l’on peut refaire un individu entier. Tant que vous êtes à 12 cellules vous pouvez recouper, vous pouvez cloner autant que vous voulez, chaque cellule peut tout faire. Si vous les prenez plus tard, elles ne sont plus capables de faire ce genre de chose, donc elles ne gouverneront jamais le développement de l’homme dans le mouton par exemple. Et là, on a pris des cellules capables de remplir ce trou puisque le mouton n’avait pas de cellule de pancréas, qu’il y avait plein de signaux du mouton pour que le pancréas se crée. Il y avait de la place. Les cellules humaines que l’on a injectées sont des cellules qui ont encore le potentiel de différentiation, et de combler les trous sur les demandes, en quelque sorte, du mouton.

Alors quel était l’objectif ?

Le but, justement, c’est de faire un pancréas avec des cellules humaines, mais un pancréas de mouton avec des cellules humaines, donc avec des îlots qui vont sécréter par exemple l’insuline humaine, ou d’autres hormones. Donc d’avoir un organe potentiellement transplantable soit globalement, soit sous forme d’îlot en prenant les cellules, soit, au contraire, à être utilisées comme outil de fabrication d’insuline.

Alors, est-ce que l’on a des résultats concrets ? Est-ce que finalement cela se passe bien ?

Il y a des résultats, mais qui sont très loin d’être la solution thérapeutique finale. Le résultat important c’est que des cellules souches humaines se sont implantées ainsi dans un embryon de mouton jusqu’au 27e jour où l’on n’a pas le droit de continuer le développement des embryons mixtes à partir de tissus humains pour l’instant. Mais il s’en est développé très peu, il n’y a pas eu de quoi faire un pancréas entier. Cette histoire a eu un écho médiatique parce que les scientifiques ont demandé à garder leurs embryons jusqu’au 70e jour, qui est le délai normal de développement du pancréas chez le mouton, et ils ne savaient pas que de vouloir franchir, ce qui leur paraissait une banalité comme allongement de la durée de l’expérience, faisait franchir une barrière légale. Et que la discussion de l’autorisation qu’ils demandaient allait durer beaucoup plus que 70 jours.

Donc, c’est un essai, est-ce que cet essai se révèle concluant ?

Ce qui est tout à fait concluant c’est que des cellules humaines se soient installées, mais on est encore très loin, je vous l’ai dit, d’avoir un tissu pancréatique en quantité suffisante qui se soit développé chez cet embryon de mouton. Encore une fois il s’agit d’un embryon.

Alors donc, tout cela est à l’étude à l’heure actuelle, et on est très loin du but, on est très loin de ce que l’on pourrait espérer, mais enfin il y a quand même un côté manipulation ?

Mais il est bien évident que l’on manipule un animal ! On ne manipule pas un être humain, il n’est pas question de fabriquer un être humain. De même que l’on envisage, ou que l’on a essayé jusqu’à présent de faire des greffes d’organes animaux chez l’homme, le raisonnement est d’améliorer cet organe animal pour le rendre plus adapté à l’homme. On est très loin, et même totalement à l’opposé, de développer des chimères, c’est-à-dire des choses qui soient moitié homme moitié animal. Le Centaure n’est pas du tout, du tout, dans le potentiel de cette expérience.

En tout cas il y a des recherches dans ce domaine.

Du Centaure ? Non !

Non, pas dans le Centaure, mais dans les greffes d’organes, peut-être un jour, mais en ce moment on peut dire que l’on en est encore très très très loin.

Absolument, et c’est pour cela qu’il faut permettre aux scientifiques de progresser parce que les choses ne tombent pas du ciel, du moins en matière de recherche médicale, et il faut progresser pas à pas. Une étape comme celle-là, qui peut paraître très loin du résultat final, est déjà une étape indispensable. Mais il faut faire les étapes suivantes, sinon on n’arrivera jamais au but.

En tout cas, on retrouvera votre chronique dans votre blog, sans doute ?

Absolument !

Alors, cette chronique à un titre précis, vous nous l’avez donné tout à l’heure, « Dessine-moi un mouton » dit le diabétique.

Ou le Petit Prince diabétique.

Ou le Petit Prince diabétique.

On a compris la subtilité, mais on a compris aussi qu’il fallait faire attention dans les manipulations.

Eh bien, par définition on fait attention dans les manipulations, celles-ci n’auraient pas été autorisées si elles avaient utilisé des cellules souches à un stade totipotent.

Jacques Cohen, merci d’avoir été avec nous dans cette chronique. On vous retrouve, si vous le voulez bien, la semaine prochaine, merci de nous avoir accompagnés.

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