Jeanne d’Arc chef de guerre

Les premiers combats de Jeanne d’Arc

Un sans faute politico-militaire

JHMC

La levée du siège d’Orléans et ses suites, puis le raid sur Reims couronné par le sacre de Charles VII, représentent une série de succès tactiques et stratégiques remarquables, alliant les moyens politiques, diplomatiques et militaires pour un maximum d’effet à partir de ressources limitées.

La clairvoyance de la conduite des opérations durant cette période contraste à la fois avec les bévues tactiques des troupes royales, jusqu’en février 1429 où elles furent défaites lors de la bataille des harengs que l’on reverra plus loin. Comme avec les échec successifs et la tactique pitoyable de Jeanne d’Arc, lorsqu’elle mènera ensuite seule les opérations militaires suivantes sur la Loire, puis à Paris, jusqu’à Compiègne, après que le Roi lui ait retiré son état-major.

Assez curieusement, il n’y a pas de certitude sur l’identité du stratège du camp royal puisque l’affichage de communication fût d’en créditer Jeanne d’Arc. Gilles de Rais est souvent cité. Ce n’est pas invraisemblable pour l’aspect tactique militaire, mais hautement improbable pour la stratégie globale. Il suivra Jeanne d’Arc dans ses aventures malheureuses, et sa propre fin témoigne de ce que la politique n’était pas son fort.

Si l’ensemble de l’opération était l’oeuvre directe de Charles VII, il n’aurait pas été nécessaire de monter l’opération Jeanne d’Arc pour le convaincre. Il est donc vraisemblable que les véritables stratèges sont sa femme, Marie d’Anjou et surtout sa belle-mère, Yolande d’Aragon.

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Crédit des illustrations et de la documentation Wikipedia et surtout le groupe Xenophon

 Contexte militaro-politique

Si l’imagerie du XIXe siècle a représenté une anachronique nation française envahie par les Anglais, la réalité est tout autre. Il y a schématiquement trois forces presque égales qui se disputent la royauté : le camp anglais est certes le plus fort, mais il n’a en quelque sorte pas la majorité absolue vis-à-vis des Bourguignons qui tiennent tout l’est de la France et du camp du futur roi Charles VII qui en tient le sud et le centre. Culturellement, si les « Anglois » étaient encore parfaitement indistinguables des autres féodaux français un siècle plus tôt, le poids de leurs possessions en Grande-Bretagne a commencé à peser vers une culture autonome. Leur langue est encore le Français. Sans Jeanne d’Arc et Charles VII, l’anglais ne serait resté qu’un patois îlien des classes inférieures. Mais militairement, les cultures des deux camps, que nous appellerons maintenant par simplification français et anglais, sont nettement différentes comme le montrent spectaculairement les batailles de Crécy en 1386 et celle d’Azincourt en 1415. En soixante-dix ans les Français n’ont pas trouvé la solution permettant de vaincre en bataille rangée les troupes anglaises. En effet, l’armée anglaise dispose d’archers.

Il s’agit d’un corps particulier, fort coûteux à entretenir. Ces athlètes de haut niveau doivent s’entraîner toute l’année pour être capables de bander et tirer dix à quinze fois par minute le « Long Bow », un arc qui peut tantôt tirer des nuées de flèches légères à 300 m dont la densité trouve toujours les défauts des cuirasses, tantôt tirer des flèches lourdes qui à 80 m peuvent transpercer une cuirasse métallique. Les bataillons d’archers sont protégés derrière des palissades et des rangées de pieux qui retardent la fin du parcours d’une charge de cavalerie et permettent aux archers d’abattre à courte distance ceux qui ont échappé aux nuages de flèches.

Les troupes françaises emploient des arbalétriers qui ne tirent que quatre carreaux à la minute, dont le pouvoir de perforation plus grand ne compense pas la faire cadence de tir.

Peu à peu les troupes françaises vont employer des canons légers à mitraille (couleuvrines) et de vraies pièces d’artillerie de portée supérieure aux arcs anglais et elles reprendront le dessus comme en témoigne la bataille de Castillon en 1523, soit en gros un siècle après Crécy.

Néanmoins pendant ce siècle de suprématie anglaise en bataille rangée, les Anglais ne remporteront pourtant jamais une victoire totale éradiquant leurs adversaires. En effet, dans les batailles de siège, défensive ou offensive, le camp français reste supérieur.

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Positions anglaises du siège d’Orléans

La levée du siège d’Orléans

En 1429, les Anglais et les Bourguignons alors alliés, assiègent Orléans. Après avoir tâté les défenses de la ville, ils renoncent à l’assaut de vive force pensant la faire tomber par la famine. Mais en février 1429, vraisemblablement sur conseil du camp du Dauphin, les Orléanais proposent aux Bourguignons de devenir leurs vassaux, ce que les Anglais qui veulent la ville, refusent. Du coup les Bourguignons se retirent laissant seuls les Anglais assiéger la ville sur un périmètre dont ils n’ont plus les forces nécessaire à la rendre étanche. Si le ravitaillement normal de la ville reste impossible, il est en revanche relativement facile d’y entrer et d’en sortir.

En avril, le Dauphin envoie une armée de secours lever le siège d’Orléans. C’est du moins ce que raconte la tradition revue et corrigée au XIXe siècle par Michelet et successeurs. En fait, une armée de secours significative partant de Blois aurait vraisemblablement remonté la rive droite de la Loire pour prendre à revers les fortifications anglaises de siège du secteur nord-ouest de celui-ci. Il est beaucoup plus vraisemblable que l’envoi s’est limité à celui de Jeanne d’Arc avec une escorte ainsi qu’un convoi de ravitaillement, le tout ne dépassant pas le millier d’hommes voire moins. L’ensemble chemine en effet rive gauche et assez au large du siège pour dépasser Orléans et rejoindre la Loire en amont de cette ville. Le rendez-vous avec une sortie des assiégés se situe à Chezy en amont où des barges seront préparées pour traverser le fleuve et décharger plus ou moins discrètement tandis que Jeanne d’Arc et son escorte rentrent également en ville par la porte de Bourgogne soit par l’est, le 29 avril 1429.

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A partir du 4 mai, les troupes françaises vont utiliser une tactique fort simple et redoutablement efficace contre les Anglais qui n’ont pas pris à temps la décision de lever le siège et de regrouper leurs troupes. Les Français attaquent à chaque fois un seul ouvrage anglais avec toutes leurs forces, à l’exception d’une troupe de diversion qui fait mine de passer à l’assaut sur un autre ouvrage à l’autre bout du siège. Le commandant anglais Talbot ne comprend par l’idée stratégique et se fait berner à chaque fois en défendant prioritairement ses fortifications nord-ouest, alors que les troupes françaises vont faire sauter le bastion nord-est rive droite (Saint-Loup), puis le bastion sud-est rive gauche (Saint-Jean-le-Blanc) avant de s’en prendre au couvent des Augustins, à la barbacane et à l’ouvrage des Tourelles à l’entrée sud du principal pont d’Orléans (qui est d’ailleurs coupé). Le siège est donc levé pour les principaux axes de communication sud le 7 mai. Le lendemain 8 mai, le commandant anglais Suffolk place son armée en ordre de bataille traditionnel en avant de la fortification nord-ouest en pensant que les troupes françaises vont, comme d’habitude, se jeter sur le chiffon rouge par une charge de cavalerie qu’il attend de pied ferme avec ses archers. Une partie des troupes anglaises se trouvant à l’est d’Orléans, à Jargeau, doit balayer les arrières des troupes françaises lorsqu’elles se seront cassé les dents sur le corps de bataille habituel au nord-ouest. Mais au lieu de se jeter sur le chiffon rouge, les troupes françaises vont partir rive gauche faire la jonction avec les troupes du Dauphin et attaquer Jargeau, à l’est d’Orléans, qui tombe en deux jours. Les troupes françaises vont continuer rive gauche en allant vers l’ouest conquérir les ponts successifs. Le corps de bataille anglais principal, de peur d’être pris à revers, doit retraiter, lui aussi sur l’ouest et son arrière-garde et sa logistique se font étriller trois jours de suite, notamment à Meung et à Beaugency. Les troupes du Dauphin tiennent ainsi Orléans et les principaux ponts à l’est et surtout à l’ouest de la ville. Loin de considérer ces succès comme suffisants, puisque interdisant tout passage vers le sud de la Loire aux troupes anglaises, les troupes françaises vont effectuer une manoeuvre audacieuse et décisive.

L’armée de secours anglaise, la bataille de Patay (18 juin 1429)

Les troupes françaises réunies en un seul corps traversent la Loire et marchent vers le nord. Elle ne pourchassent pas seulement une partie des troupes anglaises qui retraitent vers Paris, l’autre s’égayant vers l’ouest et Rouen. Le camp du Dauphin sait que les Anglais disposent d’une réserve stratégique significative et qu’une armée de secours doit se porter vers Orléans depuis Paris. Les troupes françaises marchent donc en fait à sa rencontre en direction de Janville, à la fois pour éviter qu’elle ne se regroupe avec les restes des troupes défaites aux alentours d’Orléans, et surtout pour la surprendre, ne pas lui laisser le choix d’un terrain défavorable à la cavalerie et permettant d’embusquer et de cacher ses fameux archers. De fait, seuls trois cents hommes avec John Talbot, échappés de Meung-sur-Loire, ont pu rejoindre l’armée de secours commandée par John Falstolf. Apprenant que les troupes françaises sont sur les talons de Talbot, celui-ci préfèrerait se replier vers le nord pour ne pas affronter immédiatement les troupes françaises. Ce n’était pas l’opinion de Talbot, qui est un personnage beaucoup plus important à la cour d’Angleterre, la bataille aura donc lieu à Patay. Tout au plus Talbot accepte de proposer au camp français un combat de champions pour gagner le temps dont Fastolf a besoin pour préparer son champ de bataille et tout particulièrement les fortifications et les camouflages des archers.

Le commandement du camp français n’a que faire du folklore de la chevalerie et poursuit son objectif : engager les Anglais le plus vite possible sur ce terrain dégagé de toute part qui leur est défavorable puisqu’il permet les manoeuvres d’enveloppement et qu’au surplus les Anglais n’ont pas eu le temps d’installer les fortifications provisoires.

La légende veut qu’un archer anglais ait tiré un cerf traversant le futur champ de bataille, déclenchant un hourra de toute l’armée anglaise, indiquant ainsi leurs positions à l’avant-garde des guetteurs français qui n’étaient autre que l’Etat-major avec Jeanne d’Arc elle-même. La cavalerie française, plutôt que de charger de front, s’engage alors dans un petit bois pour déboucher derrière les archers sans protection sur leurs arrières et les massacrent en un instant.

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Le site exact reste controversé

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Mais l’attaque menée au plus vite par la cavalerie française avec enveloppement de l’infanterie puis balayage des archers anglais non encore fortifiés est certaine.

Bataille de Patey Données archéologiques. Entre St Sigismond et St Peravy

Données bibliographiques traditionnelles : Devant Patay.

Les données archéologiques situent en fait la bataille un peu plus au sud, près du village de St Sigismond, la cavalerie française bousculant les archers anglais dans leurs préparatifs d’installation sur la petite vallée de la Retrêve. Quoi qu’il en soit à St Sigismond ou à Patay les archers éliminés, les troupes anglaises sont massacrées et Fastolf perd même ses chariots, ne s’échappant qu’avec une poignée de cavaliers.

Du côté anglais le désastre est complet. L’armée française de 5 à 8.000 hommes au total a battu une armée de siège équivalent ou légèrement supérieure, plus une armée de secours d’environ 3.000 hommes. Au moins 500 archers ont été massacrés. Il faut donc des explications et des responsables qui ne peuvent être Talbot et Suffolk. Tout d’abord l’habilité diabolique du commandement français ne peut venir que du diable lui-même, par l’intermédiaire de Jeanne d’Arc promue sorcière.

Ensuite Fastolf portera le chapeau de la première défaite anglaise en bataille rangée depuis 80 ans !

Qui est John Fastolf ? On le connaît par le personnage de Falstaff que Shakespeare en a tiré. Compagnon de beuverie du prince, truculent, un peu soiffard, dont l’armée ne peut être qu’indisciplinée…

En fait, Shakespeare ne fait que reprendre le tableau noirci de l’histoire anglaise officielle. Fastolf est limogé après cette défaite. Il est radié de l’ordre de la Jarretière et envoyé comme gouverneur dans un petit château des Deux-Sèvres. On ne lui payera pas d’ailleurs les revenus prévus, si bien qu’il protestera par écrit en 1431. Document qui figure aux archives municipales de Reims.

C’était pourtant, avant de servir de bouc émissaire, un chef de guerre talentueux, monté en grade au mérite. Il est par exemple le vainqueur de la bataille des Harengs de février 1429. Fastolf avec sans doute un millier d’hommes environ escorte un convoi de chariots portant plus de 1.000 barils de harengs, fourniture annuelle venue du nord via Paris pour le ravitaillement de l’armée de la Loire des troupes anglaises. Le camp français en ayant eu vent monte un raid de probablement 3.000 hommes pour anéantir l’escorte et sans doute récupérer les harengs. L’attaque surprise échoue car Fastolf fait placer ses chariots en cercle, comme dans le Far West, sauf que là les archers sont au centre du cercle et les cavaliers qui tentent d’approcher n’ont pas de fusils. Même en ayant perdu la première manche, le camp français a l’avantage du nombre et même deux couleuvrines qui commencent à tirer sur les chariots, éventrants les barils et quelques soldats anglais. Trop contents du succès de leur arme nouvelle, les troupes françaises ne les ont guère protégées, Falstolf fait sortir du cercle de ses chariots sa maigre cavalerie par surprise et va les détruire. Puis ses cavaliers se réfugient à nouveau dans le cercle des chariots. Les troupes françaises reprennent alors leurs vieux démons et foncent tout droit pour se faire décimer par les archers. Après de lourdes pertes, le camp français n’a plus qu’à retraiter sans ramener le moindre hareng.

Après avoir défendu la mémoire du malheureux Fastolf, voyons quelles options s’offraient au camp du Dauphin.

Que faire de la victoire ?

Trois possibilités s’offrent au camp du Dauphin après la victoire : s’en contenter, foncer sur Paris, aller se faire sacrer à Reims.

Le stratège politique du camp du Dauphin n’est pas Hannibal, il veut immédiatement exploiter l’avantage. Le choix est plus délicat qu’il n’y paraît. Prendre Paris avant que de nouvelles troupes anglaises n’arrivent, n’est pas impossible avec les troupes disponibles et l’auréoles d’invincibilité conférée par Jeanne d’Arc. L’impact politique serait énorme, les Bourguignons réalistes abandonneraient l’alliance avec les Anglais, et on gagnerait un peu de temps dans la guerre de 100 ans. Mais les risques sont importants : le succès militaire n’est pas assuré, se faire prendre au piège dans un siège de Paris par les Anglais n’est pas impossible non plus. Le choix de Reims est d’un bien meilleur rapport qualité/prix. Le risque militaire est faible car ni les Anglais, ni les Bourguignons n’imaginent un raid sur Reims. L’impact politique d’un couronnement sera considérable. L’impact politique de la démonstration de force d’avoir osé aller aussi loin en territoire présumé hostile sera, lui aussi, considérable. Le raid sur Reims peut commencer alliant diplomatie et menace militaire avec succès pour atteindre son objectif : aller le plus rapidement à Reims.

Jeanne d’Arc, Gambetta, même combat !

La situation du camp français après sa victoire autour d’Orléans s’est reproduite pendant la guerre de 1870. De nos jours beaucoup de gens lisent cette guerre avec la grille de la campagne de France de 1940 et imaginent qu’après la défaite de Sedan, la messe est dite.

En fait, Bismarck se retrouve assiéger Paris tandis que des armées considérables sont retenues autour des places fortes non investies, Metz, Bitche, Belfort, que ses lignes de communication sont attaquées par les francs-tireurs, l’obligeant à distraire encore des troupes pour les moindre déplacement d’approvisionnement et que le gouvernement provisoire rassemble des armées à l’ouest et au centre. La situation va rester indécise plusieurs mois avant que ces armées ne soient défaites par les troupes allemandes.

Une armée de 200.000 hommes est rassemblée par le gouvernement provisoire comme armée du centre et confiée au général d’Aurelle de Paladines. Cette armée de 200.000 hommes s’apprête à encercler Orléans où se trouvent les troupes bavaroises du général Van der Tann. Celui-ci est meilleur que Talbot et Sufolk. Il quitte la ville avant d’y être piégé et accepte la bataille en rase campagne, à Coulmiers, où il pense bénéficier de la supériorité de son artillerie. Mais celle-ci est peu mobile, d’autant que le terrain est gras, et les troupes françaises vont manoeuvrer et détruire la quasi-totalité de l’armée bavaroise.

Gambetta souhaite marcher immédiatement sur Paris pour en lever le siège. D’Aurelle de Paladines refuse et va fortifier Orléans, ce qui n’empêchera pas la reprise d’Orléans par les troupes allemandes lorsque les 80.000 hommes qui encerclaient Metz devenues disponibles après la capitulation de Bazaine, fonceront renforcer les troupes allemandes sur la Loire, pourchassant l’armée du centre jusqu’à Blois.

Il est savoureux que Gambetta ait partagé l’opinion de Jeanne d’Arc et surtout qu’il n’ait pu en convaincre d’Aurelle de Paladines qui était un catholique mystique qu’on qualifierait aujourd’hui d’intégriste. Gambetta ignorait peut-être la similitude entre la bataille de Coulmiers et celle de Patay.

Deux autres opinions peuvent être retenues pour savoir si la position de Gambetta était réaliste. Tout d’abord dans la presse anglaise, une chronique de la guerre en France était publiée sous un pseudonyme que les contemporains pensaient celui d’un général de l’état-major anglais. Ce commentateur a estimé que d’Aurelle de Paladines avait eu raison de ne pas attaquer immédiatement mais qu’il fallait pour les Français, sous quelques jours au plus, monter une opération combinée d’une sortie de Paris pour les troupes du général Trochu, combinée à une offensive vers le nord de l’armée du centre, qui mettrait en péril d’être coupé du gros des troupes allemandes toutes la partie ouest d’encerclement de Paris, ce qui obligerait Bismarck à lever le siège. Néanmoins, ce commentateur insistait sur l’impossibilité d’une attaque immédiate venant uniquement du sud. Ce commentateur soulignait également que les troupes allemandes, qui avaient quitté Metz, viendraient certainement sur la Loire et non pas sur Paris et ne laissaient qu’une semaine ou deux d’opportunité pour la manoeuvre. Ce commentateur, dont on peut lire les chroniques rassemblées aujourd’hui en ouvrage, n’est pas tout à fait un inconnu à gauche puisqu’il s’agissait de Friedrich Engels.

Cependant, un avis plus autorisé peut-être sollicité : celui de Bismarck ! Après la défaite de Coulmiers, Bismarck avait fait préparer les chariots des troupes à l’ouest de Paris dans l’éventualité où il faudrait qu’elles rejoignent le gros des troupes allemandes pour affronter l’armée du centre au prix de la levée du siège de Paris.

Revenons quatre siècle et demi en arrière.

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Le raid sur Reims. Menaces et persuasion…

La route sur Reims depuis Gien passe par Auxerre, Troyes, Châlons-sur-Marne et Reims. Plusieurs centaines de kilomètres en territoire contrôlé par les Bourguignons. Loin, à l’échelle des moyens de communication de l’époque, de l’axe Orléans-Paris sur lequel Anglais et/ou Bourguignons pourraient éventuellement les attendre.

L’armée de 5/6.000 hommes n’est pas négligeable vis-à-vis de places fortifiées défendues par de faibles garnisons, mais le camp du Dauphin n’a absolument pas les moyens de perdre le temps du siège d’aucune d’entre elles qui ferait perdre toute chance de réussite de l’opération. Il faut donc négocier en soulignant le pouvoir de nuisance d’une telle armée vis-à-vis de chaque ville, comme l’immense bonne volonté du Dauphin à payer très largement ses approvisionnements. A Troyes par exemple, l’accord stipule que les troupes royales seront ravitaillées mais resteront hors de la ville, sauf l’état-major qui y dormira au chaud et au sec tandis que les troupes bourguignonnes resteront sagement dans leur casernement et qu’il ne leur sera fait aucun mal. Les choses se passent tellement bien et tout le monde étant tellement contents de l’accord, que les troupes du Dauphin auront même le droit d’assister à la messe et de défiler en ville en partant.

A Châlons-sur-Marne les choses se passent aussi bien mais surtout, c’est là que se situe le gros morceau de la négociation : l’entrée dans Reims. La hiérarchie catholique n’est nullement favorable au Dauphin. La plupart des accessoires du sacre (couronne, globe, huile…) ont été mis à l’abri à Paris depuis longtemps. Cette huile ayant une appellation d’origine contrôlée Saint Remi depuis Hincmar, il est donc formellement impossible de sacrer quiconque à Reims. Au surplus, la ville pourrait militairement tenir au moins les quelques jours de siège nécessaire à l’arrivée des troupes anglaises depuis Paris, ou bourguignonnes d’un peu partout dans la région.

Connaissant l’antagonisme entre l’archevêché et la municipalité, c’est avec les échevins que le camp du Dauphin va négocier. Les échevins veulent échapper au joug ecclésiastique et lorgnent sur le modèle du décapole alsacien. Les tentatives de leurs prédécesseurs ont toutes été infructueuses malgré plusieurs guerres civiles, l’armée royale est même venue au secours de l’archevêque deux siècles plus tôt. Parier sur le camp royal et investir pour l’avenir est assez tentant. Surtout en faisant le pari que l’archevêque ne prendra pas le risque du pari inverse en jouant contre Charles VII. Ce qui pourrait effectivement en représailles satisfaire dans l’avenir les revendications municipales. En prime, le camp du Dauphin promet aux édiles rémois quelques friandises futures, promesses qui n’engagent que ceux qui les écoutes. Le futur roi fit également quelques cadeaux comme l’absence de levée de taxes spéciales pour ce sacre, contrairement à l’habitude, ce qui ne grevait pas trop le trésor du pouvoir central puisqu’il privait simplement ainsi d’une recette l’archevêché, la collectivité territoriale en quelque sorte…

On dénichera donc une fiole d’huile sacrée de secours ou de réserve qui pourra faire l’affaire, en se passant des autres « Regalia » dont l’absence aura moins d’impact politique que celle d’une huile venue du ciel.

Les troupes du Dauphin commencent le raid sur Reims en traversant la Loire, à Gien en direction d’Auxerre et Troyes. La cavalcade royale peut entrer dans Reims le 16 juillet dans la journée. Le sacre est fixé au lendemain matin à l’aube du 17 juillet 1429. Les instruments du sacre ne sont pas là. Les pairs du royaume, à l’exception de l’archevêque de Reims, des évêques de Laon et de Châlons, sont absents, mais, à la guerre comme à la guerre, on sacre à la cathédrale sans les grandes manifestations habituelles des sacres (parades de rue, festins…) car dès le lendemain matin à l’aube, l’armée royale quitte Reims pour rentrer en Touraine… par le chemin des écoliers pour des raisons de sécurité ! Le cortège sort en effet par la porte de Mars, plein nord, en direction de Laon mais à Corbeny il bifurque à l’ouest par le chemin des Dames, rejoint Soissons puis Lagny et redescend enfin vers Orléans.

Après le succès de l’opération du sacre à Reims, le temps n’est plus pour Charles VII à guerroyer pour Compiègne ou même Paris, mais à négocier avec les Bourguignons pour pouvoir grignoter les Anglais sans devoir combattre sur deux fronts. De plus, la guerre coûte cher, même en ayant précisément en 1429 racketté de 1.000 écus son probable complice, Jacques Coeur pour frappe de monnaie au titre d’argent insuffisant.

Pour conclure sur Jeanne d’Arc, la période traitée aujourd’hui correspond en quelque sorte à l’état de grâce de la brève carrière de Jeanne d’Arc dont toutes les aventures militaires seront ensuite des échecs. Elle n’a jamais prétendu être l’instigatrice des ses propres actions, mais avoir entendu des voix les lui ordonnant. Les croyants sont obligés par son histoire d’admettre Dieu, fin politique et fin stratège militaire. Pour les mécréants, la voix principale est certainement celle de Yolande d’Aragon, belle-mère du roi Charles VII, remarquable femme politique. Son acolyte militaire restant lui incertain : Richemond ? Dunois ? D’Alençon ? ou… Gilles de Rais qui fût quand même nommé Maréchal de France au lendemain du sacre.

Bibliographie :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Si%C3%A8ge_d%27Orl%C3%A9ans
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_d%27Arc
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Patay
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Jargeau
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Meung-sur-Loire
http://xenophongroup.com/montjoie/orleans.htm
http://xenophongroup.com/montjoie/orleans2.htm#third
http://fr.wikipedia.org/wiki/John_Fastolf
http://fr.wikipedia.org/wiki/Arc_long_anglais
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Castillon
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Formigny
http://fr.wikipedia.org/wiki/Raid_sur_Reims
http://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Jean_Baptiste_d%E2%80%99Aurelle_de_Paladines
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Coulmiers
http://www.loiret.com/cgloiret/index.php?page=display&method=h_display_full&class=notrehistoire_unefois&object=r39_iletait
http://morgann.moussier.free.fr/orleans/histoire/TroisRep.htm
http://www.loire1870.fr/pa_ope/operations02.htm
http://www.marxists.org/archive/marx/works/1870/11/16.htm

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