Sur les ondes… il y aura toujours des vaches folles !

Emission diffusée mercredi 30 mars 2016 sur RCF Reims : https://rcf.fr/actualite/la-vache-folle-des-ardennes

AV: Chronique d’actualité avec Jacques Cohen, bonjour Jacques, on va prendre la direction des Ardennes. Ce n’est pas souvent. Pour évoquer ce cas de vache folle. Je parle sous votre contrôle, on parle d’ESB, l’encéphalopathie spongiforme bovine ?

Exactement, encéphalopathie spongiforme bovine, le nom est tout à fait évocateur puisqu’il dit que le cerveau devient comme une éponge. Ce qui veut dire qu’il se porte assez mal. On a entendu beaucoup de choses purement idéologiques sur le sujet. Il faut peut-être retourner aux choses basiques, c’est-à-dire: que sont ces maladies à prion ? ( sans S….).

Ces maladies sont quelque chose d’infectieux très particulier. C’est le seul cas connu pour l’instant de protéine infectieuse. C’est de la contagiosité par imitation.

Imaginez que vous avez une protéine qui est pliée d’une certaine façon pour son fonctionnement normal dans l’organisme. Vous introduisez à côté d’elle une autre qui est pliée de travers. Quand elles vont se toucher, la protéine en configuration normale va basculer vers la configuration anormale.

Cette configuration anormale conduit à ce qu’elle puisse précipiter, à ce qu’elle soit mal éliminée, à des dépôts et à une toxicité. Donc on a en fait une protéine normale qui ne change pas mais dont la conformation va changer de proche en proche et très lentement.

Pour l’homme, ce sont des dizaines d’années, 40, 50 ans. Pour les bovins, c’est de l’ordre de 5, 6, 7 ans minimum pour avoir des quantités significatives de protéines anormales. Et cette protéine qui est devenue anormale est de ce point de vue là infectieuse, parce que si on la transporte dans un autre animal, il sera malade. Quand on a ces pliures anormales, non seulement chez les animaux mais chez l’homme car nous avons quelques maladies qui ressemblent. Elles sont facilitées par le pointillé c’est-à-dire, selon des éléments génétiques de ce qu’on appelle des allèles de protéines, des pointillés qui permettent que cela se plie plus ou moins facilement.

C’est ce qui s’est passé pour le variant de la maladie de Creutzfeldt et Jakob, liée aux bovins. Il s’agit d’une protéine anormale bovine qui finissait par donner la maladie chez l’homme à condition d’avoir une pliure anormale.

Il y a eu 222 cas. On avait une grande inquiétude qui est que les gens qui n’avaient pas cette pliure anormale seront-ils malades 10, 15, 30 ans après ? Après la première vague des gens particulièrement susceptibles à la pliure anormale? il ne semble pas. Pour des raisons que l’on ne détaillera pas mais statistiquement les premiers cas chez les gens sans facilité de pliure auraient dû déjà apparaître. On a 15 ans de recul et on n’en a pas observé. Donc on peut être modérément optimistes, même raisonnablement optimistes.

On n’a eu « que » 222 morts, et il faut rappeler que cette maladie est constamment mortelle et que sa fréquence ne peut être sous-estimée.

Alors on a vu cette épidémie chez les humains à partir de viande bovine, de bovins qui avaient été nourris avec des farines animales. C’est-à-dire qu’on avait nourri ces bovins avec des farines faites de carcasses animales dont des carcasses bovines. Et on avait ainsi peu à peu augmenté la concentration de la maladie et obtenu une épidémie chez les bovins à un niveau qui a fini par passer chez l’homme, à une très faible échelle comme on le voit, mais qui a fini par passer chez l’homme.

Donc on a arrêté les farines, on a fait des tests stricts de dépistage. On a évité aussi de laisser vieillir les bêtes et la maladie est contrôlée. C’est une épidémie qui a disparu, chez les bovins comme chez l’homme.

Est-ce que la maladie de la vache folle chez les bovins a disparu pour autant ? En surface oui. Mais en-dessous le taux spontané de maladie bien avant les farines, peut être estimé autour d’ un cas par million à peu près. Donc cette maladie existait et existe toujours. Le dépistage qui a été mis en place pour éliminer l’épidémie n’est pas fait, n’a pas été fait, pour dépister les quelques cas résiduels. Quoi qu’on ait trouvé un cas résiduel en Irlande, un cas résiduel en Angleterre en 2015 et maintenant celui-ci en France dont tout l’enjeu est de savoir s’il est résiduel. C’est-à-dire si c’est la seule bête qui, soit pour des raisons infectieuses mystérieuses, soit par mutation génétique sur sa protéine, a la maladie. On a dit que cette bête n’a jamais reçu de farines, cela paraît évident. Qu’elle n’a pas été malade et qu’on l’a découverte par hasard. Ce n’est pas tout à fait vrai car elle a eu un accident, elle s’est cassée la figure pendant une saillie. Elle s’est cassé la patte donc c’est qu’elle n’était peut-être pas parfaitement stable.

On doit abattre toutes les vaches de l’élevage de sa tranche d’âge. Cela fait une centaine de bêtes. C’est tout à fait normal. Il est prévu des indemnisations pour les éleveurs dans ces cas là. Vu l’enjeu financier si la France doit à nouveau passer dans la catégorie des maladies non totalement maîtrisées et ne pas pouvoir exporter dans un certain nombre de pays, vu l’échelle, c’est une dépense infime pour le Ministère de l’Agriculture. Pour l’éleveur, c’est toujours désagréable, surtout qu’il s’agit d’un élevage de naisseurs. Donc ce sont des vaches avec des veaux etc. Liquider tout un cheptel, cela fait toujours mal au coeur mais il n’y a pas 36 solutions. Il faut tester tous les cerveaux.

Si on trouve d’autres cas infra-cliniques, il va falloir étendre l’enquête et s’occuper de réduire ce qui pourrait être un foyer émergent. Si c’est un cas isolé, on va tomber dans la configuration des cas sporadiques de la maladie qui doit exister depuis toujours chez les bovins. Mais la question qui se pose est : faut-il s’en accommoder ? Ou faut-il changer le type de dépistage pour que tous les animaux soient testés ? Et qu’on essaie d’éradiquer cette maladie complètement. Sauf qu’il n’est pas absolument certain qu’on puisse l’éradiquer. Si ce sont des mutations génétiques de temps en temps, une par million, il n’y a aucune mesure qui empêchera cette vache par million d’avoir cette anomalie.

Voilà la base scientifique du problème qui n’a rien à voir avec tout ce qu’on a entendu sur l’anathème contre les élevages modernes, le nombre de vaches dans les élevages, leur nourriture etc.

Il faut ramener la question à sa juste proportion qui est celle d’une maladie assez bizarre et dont on peut espérer qu’il ne s’agisse que d’un cas isolé.

Merci Jacques. On a aussi la tuberculose bovine qui frappe le département. On peut peut-être l’évoquer dans une autre émission… mais voilà il y a quand même des problèmes pour les éleveurs, c’est compliqué dans les Ardennes…

Absolument mais l’élevage est une activité très importante, non seulement pour nourrir les humains, mais au point de vue économique. La qualité sanitaire est un critère qui différencie le cheptel français d’autres cheptels et qui doit être au niveau des meilleurs.

Si nous voulons exporter, nous devons être irréprochables.

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