Chronique du vendredi 6 Octobre 2017
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On va retrouver, comme chaque semaine, notre chroniqueur qui est déjà là, en place, dans nos studios, Jacques Cohen, bonsoir, Jacques !
Bonsoir
Avec vous, la traditionnelle chronique d’actualité et aujourd’hui, dans cette chronique d’actualité, nous allons parler des places et de l’aménagement des places à Reims. C’est bien cela ?
Absolument. Il y a des projets annoncés pour la place de l’Hôtel de Ville, pour le parvis de Saint-Rémi et une polémique sur ce qui est prévu et ce que les uns ou les autres voudraient. Mais je crois que le problème est mal posé et qu’en effet on s’apprête à refaire les mêmes bêtises que pour le parvis de la gare.
Donc on va s’arrêter sur le parvis de Saint-Rémi, ça va être là la problématique sur laquelle on va développer aujourd’hui ?
Je crois qu’il faut d’abord réfléchir à pourquoi existe-t-il des places, des parvis et des esplanades. Un parvis c’est quelque chose qui est dédié à une seule activité sur son pourtour ou sur l’une de ses faces, c’est un parvis d’une église, c’est le parvis de la gare. Une esplanade c’est un espace où l’on ne se préoccupe pas de ce qu’il peut y avoir autour, mais qui est structuré par une fonction principale se déroulant dessus. Même s’il peut y avoir d’autres fonctions d’ailleurs.
Et une place, justement, cela se définit non seulement par ce qu’il y a dessus, mais même principalement par ce qu’il y a autour. Parce que c’est ce qu’il y a autour qui structure son activité.
Le parvis de Saint-Rémi, qui n’est donc manifestement pas dédié uniquement aux entrées et sorties de la basilique, est une place. Et de ce point de vue là, on constate tout de suite que c’est l’archétype de la place inutilisable sans une refonte complète. Et pas seulement en décidant que la rue qui était droite est devenue tordue et qu’elle sera à nouveau droite. Qu’on avait mis des silos à maïs avec de la verdure et que l’on va les enlever.
Tout cela ne résout pas le fait que ni la basilique ni les bâtiments qui sont autour ne remplissent une fonction d’usage. La basilique un tout petit peu, mais c’est quand même, malheureusement, très peu fréquenté et très insuffisamment utilisée au point de vue tourisme. Et tout autour il n’y a rien. Dans un angle, au loin, du côté du musée il y a un bistrot, mais tout le reste ce sont des façades mortes ou des habitations, pas la moindre vitrine, pas la moindre activité. Donc, quoi que l’on fasse sur cette place, si on ne restructure pas les bâtiments alentour pour qu’il y ait des activités, cela restera un espace mort. Cela sera quelque chose, cette fois-ci, de très minéral, j’allais dire de pétrifié puisque l’on ne veut plus mettre de verdure, mais ce n’est pas ce qui fait l’essentiel du problème.
Le problème se pose aussi pour l’Hôtel de Ville. Quand on voit, justement, sur les dessins d’artistes l’Hôtel de Ville et les façades autour illustrant ce à quoi cela ressemblerait, on voit des auvents, on voit des gens au bistrot. En fait le bistrot en question ce sont des pompes funèbres actuellement, et puis le reste ce sont des agences immobilières. Il ne reste qu’un petit magasin de photos. Donc en fait, là aussi, l’animation périphérique est le point critique de savoir ce que l’on fait de cette place.
Mais également, il faut aussi se poser la question d’avoir des espaces qui soient, j’allais dire multifonctions. De nos jours, il est très difficile de définir une esplanade pour une seule chose. Quand on voit par exemple le parvis de la gare, on y a fait des aménagements qui sont fixes, or il faudrait que les aménagements puissent être amovibles. Non pas aisément amovibles « chacun passant et embarquant une chaise » ! Mais il y a une possibilité de faire des choses qui s’enlèvent, à condition de disposer d’un camion-grue, permettant de pouvoir disposer de grands espaces, quand on veut structurer quelque chose dessus. Ce n’est pas possible pour l’instant sur le parvis de la gare. Et on s’apprête place de l’Hôtel de Ville à refaire la même bêtise. Donc, la structuration des places se raisonne autour de la place et sur comment la faire vivre. Elle se raisonne, éventuellement, par la fonction principale que l’on mettra dedans, ou par l’adaptabilité de la place à de multiples fonctions.
Si on prend l’exemple de Saint-Rémi, beaucoup de pierres, peu de verdure, est-ce que vous avez des idées là-dessus ?
Malheureusement ce n’est pas la proportion de verdure et de pierres qui changera grand-chose ! Il faudrait que le musée s’ouvre sur ce parvis, cela serait déjà un des côtés qui redeviendrait non plus un mur aveugle, mais une activité vivante. Il y a des souterrains gallo-romains et moyenâgeux sous cette place qui pourraient être visitables à partir d’un édifice touristique. Il faudrait réfléchir à l’aménagement global du quartier puisqu’il y a une rue Ferry qui est peu active, parce qu’il y a un bâtiment qui, lui aussi, fait obstacle entre la vaste esplanade de verdure qu’il y a le long de l’ancien rempart et cette place. Donc là il s’agit d’entrer dans des transformations bien plus grandes.
On voit que l’on a mis plein de choses sur l’axe de l’esplanade Fléchambault, sans que cela n’amine celle-ci. Surtout que la mode étant à mettre des plantes qui ne ressemblent pas à des plantes, mais qui ressemblent à des herbes sauvages et qui sont une végétation un peu grisâtre. Ce n’est pas cela qui va attirer les gens pour se rassembler là-dessus d’autant plus que l’on ne veut pas mettre de sièges puisqu’on a peur que les endroits où il y a des sièges soient squattés par les gens que l’on ne désire pas y voir ! Alors le problème c’est que ce n’est pas le mobilier qui fait que les gens qui s’installent sont les bons et pas les mauvais, et que l’on choisit une solution qui est très radicale c’est d’avoir personne parce qu’il y a des gens que l’on ne veut pas !
Malgré tout la verdure ça a de l’importance. Qu’en pensez-vous Jacques ?
Absolument. Quand vous voyez différents types de jardins, différents types de décoration, de par le monde, y compris en France, l’on peut avec de la verdure qui n’est pas forcément verte, mais qui a des couleurs, qui a des reliefs, qui fait des niveaux , qui fait des recoins, qui fait des coins, qui fait des zones, l’on peut faire beaucoup de choses en végétal dans de l’urbanisme et pas seulement d’avoir des vastes étendues de pierres sur lesquels on pose quelques bacs avec quelques herbes grises.
Si on synthétise rapidement ce que vous nous avez dit depuis le début, ce que vous voulez ce sont des espaces transformables ?
Il faut d’une part que les espaces soient transformables et d’autre part, l’aménagement urbain de la surface d’une place ne résout pas, par un coup de baguette magique, le problème de son animation par ses façades. Et quand il n’y a pas d’activité, il est très difficile qu’une place puisse être vivante.
Merci, Jacques Cohen, de nous avoir présenté votre chronique d’actualité. On l’aura compris, aujourd’hui consacrée à l’urbanisme, à l’aménagement des places à Reims.
Un grand merci Jacques Cohen.
Merci !