Chronique du 1 février 2019
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JC est avec nous, JC bonjour !
Bonjour.
Et aujourd’hui vous vous attaquez au relèvement des seuils de revente à perte, les SRP qui sont devenus actifs aujourd’hui. C’est vrai que quand on va faire nos courses, aujourd’hui, peut-être que certains consommateurs se sont rendus compte que leurs paniers moyens ont augmenté et pour cause, vous allez nous expliquer tout cela.
Eh bien tout cela, comme souvent, part d’une très bonne intention. C’est que ce seuil est destiné à éviter les ventes à perte et donc à éviter que la grande distribution fasse trop pression sur ses fournisseurs. Malheureusement, la négociation ne s’est pas passée, sur ce dernier point, des marges aux producteurs, aux agriculteurs.Malheureusement la négociation a été faite, j’allais dire, selon un dirigisme honteux. C’est-à-dire que les gens de Bercy et du ministère de l’Agriculture sont des dirigistes probablement jusqu’à la moelle et jusqu’à la tombe, mais l’affichage actuel est de mettre des mécanismes de régulation neutre et de ne pas dire franchement à la grande distribution « vous écrabouillez les producteurs de lait ou d’autres catégories et donc vous allez leur rendre du fric de façon autoritaire. Donc on met en place un système très compliqué qui, par le jeu des seuils, aboutit pour certains produits effectivement à rendre un petit peu aux agriculteurs. Mais malheureusement cela va concerner des tas d’autres produits parce que la grande distribution par principe fonctionne sur de très faibles marges et donc relever les marges des produits qui sont à raz du seuil, en relevant le seuil, cela va malheureusement impacter des tas de choses. Et il y en a un qui a joué le jeu inverse de l’entente de la grande distribution, c’est Leclerc, Michel Edouard LECLERC qui s’amuse à expliquer qu’effectivement cela va donner une bouffée d’oxygène extraordinaire aux planteurs de pastis ou aux éleveurs de Nutella.
Ça veut dire qu’il va falloir aller faire nos courses à Leclerc pour faire de la pub pour cette enseigne pour payer moins cher, comme ils le disent dans leur slogan ?
C’est ce que Leclerc veut faire savoir ou veut faire dire ! Resterait encore, à plus ample informé, à voir comment il se débrouille pour gagner de l’argent tout en prétendant le contraire.
Vous parliez justement de nombreux produits qui vont voir le relèvement des seuils de revente à perte augmenter, 500 produits sur 13 000 dans le supermarché, 800 sur 20 000 dans les hyper, ça laisse quand même songeur.
Non seulement, parce que c’est pour plusieurs pour cent quand même. Trois pour cent sur la consommation par définition frappe, surtout la consommation de supermarché, les produits de base. Cela frappe autant sinon plus les pauvres que les riches et c’est donc à nouveau une atteinte au pouvoir d’achat en prétendant que l’on va rendre cet argent aux paysan. La première opération ayant été celle de la vignette auto de monsieur RAMADIER qui devait bénéficier à la retraite des vieux.
Alors c’est une mesure qui a été prise par Bercy, JC vous l’avez dit il y a quelques instants et pourtant du côté du ministère de l’Agriculture de l’alimentation et du ministre en personne Didier GUILLAUME, on a l’impression qu’on regrette un peu cette mesure, alors est-ce que là il ne pourrait pas y avoir un désaccord entre deux hommes qui font partie du gouvernement d’Emmanuel MACRON ?
Il y a deux choses, d’abord il y a la préparation par Bercy de toute mesure qui puisse permettre de rattraper quelque chose et puis ensuite, la chose dérape parce que la négociation qui est menée par la FNSEA d’un côté et par le lobby de la grande distribution de l’autre et a abouti à un compromis qui est un espèce de paquet de nouilles ou d’usine à gaz qui va à l’encontre des idées initiales. Puis finalement quand c’est trop compliqué, on aboutit à ce que plus personne ne soit content. C’est la situation actuelle, alors que les consommateurs n’ont pas encore vu le résultat et que ce résultat va être très spectaculaire parce que 3 % d’augmentation de nos jours où l’inflation est basse, ça se repère quand même.
JC, les premiers impactés, ça va être les consommateurs bien évidemment, ils se retrouvent un peu pris au piège parce qu’il n’y a pas un moyen de lutter contre le relèvement de ces seuils de revente.
C’est le raisonnement de Michel Edouard LECLERC en disant, venez chez moi.
Est-ce qu’il y aurait, malgré tout, pour certains, un autre moyen ? Par exemple, vous qui avez toujours des solutions à nous proposer peut-être que là vous allez être sans voix.
Je crois que l’on ne peut pas être dirigiste à moitié. Ou on revient à des prix administrés en décidant une liste arbitraire de produits qui sont concernés. Ou on laisse le marché, comme on dit, réguler ou tenter de réguler. Mais les solutions intermédiaires de critères pseudo objectifs, mais qui ne le sont pas en fait, finissent toujours par s’écrouler sur les pieds de ceux qui ont essayé de ménager la chèvre et le chou.
Cette mesure qui est faite pour mieux rémunérer les producteurs agricoles, à un moment donné si ce n’est pas le cas, derrière le monde agricole va certainement se soulever aussi, il va y avoir des chiffres ! Alors c’est vrai que certains de nos auditeurs, certainement, qui sont agriculteurs ou d’autres soutiennent le monde agricole et se disent c’est quand même une bonne chose pour nos producteurs locaux, etc… Mais si à un moment donné il n’y a pas de résultats derrière pour les locaux, pour les agriculteurs, peut-être qu’à un moment donné ils vont dire stop, finalement on a pris cette mesure-là et puis nous on se retrouve lésé aussi.
Tout à fait, parce que j’ai toujours dit – et je l’ai dit à plusieurs reprises sur cette antenne- que Bercy était une église ou une secte, ça dépend de la taille, et que c’est l’église du Bonneteau et du Rabot, c’est une secte…
On rappelle le Bonneteau…
On va le rappeler, le Bonneteau c’est le jeu où il y a un dé et trois godets, et après avoir beaucoup bougé les godets et le dé on demande « où est-il ? ». Les gens qui ont parié dessus se trompent, Et là le consommateur se rendra vite compte que le dé qui devrait être dans la poche des agriculteurs n’est plus dans sa poche, mais qu’il n’est pas non plus dans celles des agriculteurs. Parce que Bercy a un raisonnement qui est que les réformes de structure on y arrivera jamais en France, il faut lutter contre la dépense – c’est une église très honorable -, mais également il faut subrepticement raboter chaque fois qu’on peut une petite lichette et ce sera toujours cela de pris. C’est un raisonnement qui se défend, mais qui est arrivé à peu près à son terme en termes de tolérance de la population. Et alors qu’on vient d’avoir un grand mouvement revendicatif imprécis, mais significatif d’un état d’esprit, c’est un nouvel exemple du déphasage ou de la déconnexion de Bercy et des ministres qui se font refiler ces mesures, que de tenter des opérations de ce genre en cette période.
Cependant JC, maintenant que cette mesure a été prise on imagine mal quand bien même il y ait un soulèvement du monde agricole, des consommateurs qu’il y ait un retour en arrière un jour, généralement on augmente ce genre de choses et c’est très rare de revenir dessus.
Ça dépend, les jacqueries, ça consistait autrefois à aller se servir dans les greniers du château, peut-être qu’un jour cela sera dans ceux du supermarché.
JC, merci d’avoir été avec nous ce vendredi pour nous parler un petit peu du relèvement des seuils de revente à perte, on se retrouve vendredi prochain pour une nouvelle chronique.
Oui à bientôt.