CHRONIQUE du vendredi 9 novembre 2018
sur RCF: @lien en attente
Comme tous les vendredis, il est fidèle au poste. Parfois il est sur la route, parfois il est en direct avec nous en studio et ce soir, il est avec nous en studio. Bonsoir JC !
Bonsoir.
Avec vous, on va revenir sur l’itinérance mémorielle du Président de la République, Emmanuel Macron. Un parcours qui a commencé dimanche dernier à Strasbourg et qui s’achève aujourd’hui, en tout cas pour ce qui est du pèlerinage j’ai envie de dire en dehors de Paris, du côté de Lens. Ce parcours, que vous inspire-t-il, JC ?
Eh bien, c’est un immense parcours, un pèlerinage en quelque sorte didactique, avec un très grand nombre de stations pour pouvoir couvrir tous les aspects de la commémoration de 1918, de l’Armistice de la fin de la Première Guerre mondiale. Mais avec des dissonances parce que c’est un itinéraire très intellectuel au départ, d’historiens en quelque sorte qui devait donner des éléments pour rythmer un récit dans des relais audiovisuels et de presse, à l’écart de la population. Puis, il a été jugé nécessaire par le Président d’aller quand même au contact de la population et d’avoir un EPADH par-ci, une usine par-là, etc., parmi les épisodes. De plus, il fait cela en rencontrant j’allais dire « les vrais gens ». On ne peut pas lui ôter qu’il accepte de rencontrer je dirais « n’importe qui ».
On n’est pas dans la situation que vous n’avez pas connue du Président de la République Charles de Gaulle qui avait une brigade des acclamations qui le suivait partout et qui lui évitait de rencontrer ceux qu’il ne voulait pas rencontrer. Là, le Président Macron rencontre tout le monde, se fait insulter ou se fait mettre en cause régulièrement. Parce qu’il veut, impavidement, argumenter vis-à-vis de gens qui eux ont un ressenti et un vécu à lui opposer et que ce ne sont pas du tout les mêmes discours.
JC, on va revenir bien évidemment sur cette itinérance, et notamment une phrase malheureuse qu’il a eu sur Pétain, mais avant cela, le Président de la République a bien voulu parler d’itinérance mémorielle et non pas comme on dit souvent, c’est vrai que cela ressemble un peu à un pèlerinage, mais en parlant d’itinérance, il enlève une dimension religieuse finalement que l’on a dans le terme de pèlerinage. Est-ce que cela est une vraie volonté de sa part vous pensez ?
Je le pense, je le pense. D’abord, parce qu’il se rappelle que nous sommes une République une et indivisible et laïque, et que rentrer dans une question de religion sur la Première Guerre mondiale aurait été extrêmement périlleux.
Alors, on l’a dit tout au long de son parcours, il est allé à la rencontre des personnes. Il y a eu des échanges face à la caméra et notamment en local à Charleville-Mézières, c’était mercredi matin, il y a eu cette phrase malheureuse sur le maréchal Pétain, finalement, est-ce que ce n’est pas une erreur de communication de la part du Président à ce niveau-là ?
Erreur de communication, certainement, d’autant qu’il est revenu sur ce qui avait été décidé comme argumentaire et position sur le sujet, pour s’avancer au-delà en explications et finalement se replier, j’allais dire « en catastrophe », sous le tir de barrage- c’est l’occasion de prendre l’image – sur ce qui avait déjà été préparé précédemment par son État-major et qui représentait une ligne de défense beaucoup plus raisonnable. Je crois que le principal problème du Président, c’est qu’il souffre d’une anosmie émotionnelle.
Qu’est-ce que c’est, JC ? Ne perdez pas nos auditeurs…
L’anosmie, c’est quand on ne sent pas, quand on ne renifle pas, quand on ne sent pas. C’est la perte de l’odorat. Or, l’anosmie émotionnelle c’est qu’il ne sent pas son interlocuteur. Il est capable d’un récit argumenté, il est capable de débattre de façon parfaitement logique, mais il ne comprend pas que le même mot qu’il emploie, ou le même élément qu’il emploie pour sa valeur logique a chez son interlocuteur une valeur symbolique, une valeur émotionnelle qui déclenche des émotions. Par exemple sur le sujet du maréchal Pétain, ce n’est bien évidemment pas la situation de 1916 à Verdun qui est évoquée, c’est l’Histoire de France plus tard, c’est-à-dire la question de la Seconde Guerre mondiale et d’une fracture durable de la société et de l’opinion française. Là-dessus, il est entré dans une discussion logique, position finalement intenable parce que nous ne sommes pas sur une question de logique. D’ailleurs, il a développé Pétain en Première Guerre mondiale en récitant le mythe Pétain qui est beaucoup plus tardif, parce que les historiens, maintenant pour la plupart, ( les documents sont largement disponibles ), peuvent mettre en évidence que Pétain n’est pas le vainqueur de Verdun malgré les apparences. Il s’agit en particulier du Général de Castelnau. Pétain a été nommé justement pour donner une image rassurante d’une part, et une image de général républicain, tandis que Castelnau était un bon militaire, mais quelque peu un extrémiste religieux catholique précisément, dont le pouvoir politique se méfiait. Pour que ce ne soit pas Castelnau qui soit en vitrine, on a nommé Pétain, et Pétain, il a fallu le tenir à bout de bras. D’abord parce qu’il est arrivé réellement sur Verdun quand les jeux ont été faits par l’attitude de Castelnau sans abandonner la rive droite de la Meuse. Enfin on ne rentrera pas dans les détails aujourd’hui, mais en gros Pétain, ce n’est pas un grand général qui plus tard aurait fait des bêtises. Dès 1916, il est connu pour ce qu’il est, c’est-à-dire un pleutre pessimiste, pusillanime qui ne fait pas le boulot puisqu’il passe son temps à aller courir les jupons au lieu de faire la guerre. On a eu de multiples exemples par son État-major, donc ce n’est pas un type très intéressant et c’est assez logique parce qu’il est bien rare que des types de qualité deviennent des minables par la suite. Malheureusement, il y a souvent une continuité.
JC, comment va se terminer le parcours, l’itinérance mémorielle du Président Macron ?

Joseph Zimet qui a dirigé la mission du Centenaire.
Et bien, il va continuer de station en station, et ensuite il y a un certain nombre de choses dans Paris. Ce qui est souhaitable, c’est qu’il ne se termine pas à Fontainebleau comme une autre campagne de France.
Il nous reste un petit peu de temps, j’ai envie de revenir sur cette itinérance mémorielle d’un point de vue purement politique pour le Président de la République, Emmanuel Macron. Aujourd’hui il, était dans le Nord du côté de Lens, il est passé au Café de la Place à Bully-les-Mines, là où il était passé également lors de sa campagne présidentielle. Est-ce que là, il n’y a pas aussi tout un symbole d’un Président qui veut renouer avec j’ai envie de dire « ses origines » de la campagne présidentielle, là où il a réussi à les convaincre et à aller chercher les français ?
Il en a certainement une grande nostalgie de cette campagne, parce qu’il était porté par un immense espoir populaire et maintenant, de station en station, il prend plutôt des baffes. Donc il va au bistrot ce qui était un point fort…
Où il a payé sa tournée de bières d’ailleurs pour l’anecdote.
… de son prédécesseur. François Hollande était un piller de bistrot extraordinaire du point de vue contact avec la population. On ne peut pas dire que ce soit le point fort d’Emmanuel Macron. Pendant la campagne dans un contexte politique très favorable, il y avait enregistré des succès. Je crains qu’à moins de ne faire la salle, il ait ces temps-ci beaucoup de mal à le renouveler, ce succès.
Merci JC d’avoir été avec nous ce vendredi soir. À très bientôt JC, vendredi prochain, fidèle au poste.
À très bientôt et la semaine prochaine, nous aurons probablement des choses sur le pouvoir d’achat.
Merci beaucoup JC, on se retrouve tout de suite dans le 18-19 en Champagne.