CHRONIQUE du mercredi 10 Mai 2017
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Bonjour à tous ! Chronique d’actualité avec Jacques Cohen, bonjour Jacques !
Bonjour.
AV/ On connait le nom du président de la République pour le prochain quinquennat, ce sera Emmanuel Macron, il sera investi ce dimanche, mais la question désormais ce sont les élections législatives qui vont arriver. « La République En Marche », c’est désormais le nouveau nom du parti, oui, mais avec qui Jacques ? Au niveau de la composition, de la recomposition un petit peu de l’échiquier politique, on est en pleine discussion et peut-être même, pleine tergiversation en ce moment !
Le but d’Emmanuel Macron, c’est de constituer un nouveau mouvement politique qui écrase les partis traditionnels, et qui comporte en son sein des ailes de différentes sensibilités.
Alors, sur l’évolution des partis politiques, les choses sont différentes à gauche et à droite. D’abord, on entend régulièrement parler de « casser » tel ou tel parti, je ne crois pas que l’on casse un parti de l’extérieur. De l’extérieur, il peut se rabougrir, se lyophiliser, etc., mais on ne le casse pas de l’extérieur. Les partis meurent de l’intérieur. Et là, de ce point de vue, si à gauche le PS parait bien malade, à droite c’est un peu plus compliqué. Parce que la situation n’est pas brillante, mais elle n’est peut-être pas aussi désespérée qu’à gauche.
Et, de ce fait, l’on voit des manœuvres assez complexes parce que le président Macron souhaite avoir d’emblée un mouvement majoritaire, si possible comportant de façon majoritaire des gens qui lui soient directement reliés, et non aux anciens partis. Mais dans l’éventualité où cela ne marche pas bien, il faudra utiliser des ailes, gauche et droite pour simplifier, de son parti.
À l’inverse, pour le parti traditionnel, c’est surtout à droite que la question se pose puisqu’à gauche, le PS est en perdition. Le parti traditionnel a comme attitude celle du château fort assiégé d’un côté et celle plus florentine « de Martine Aubry » de l’autre . Pour ce qui est du monde qui rallie, on voit quelques ralliements vers la « République En Marche » de la part de « Républicains » qui ne sont pas forcément des leaders de premier plan, mais quand même. L’attitude du parti à leur égard est soit de dire « c’est strictement interdit, c’est très vilain », de les gronder, ou de faire pire ! Faire pire, c’est de désigner des candidats contre eux, alors qu’ils ont maintenant l’étiquette de « République En Marche ». Donc c’est déjà une hésitation. Mais certains ont choisi de négocier avec En Marche, non pas l’étiquette mais l’absence d’adversaire En Marche sur leur circonscription. Ce qui permet une dissidence élastique.
Par rapport à ceux qui rejoignent, il semble que le courant Baroin, derrière lequel l’on voit Nicolas Sarkozy, soit éventuellement prêt à annoncer fermement que l’on fera la guerre à ceux qui rejoignent « En Marche », tandis que le courant Juppé comprend la vie.
On peut aussi noter, qu’en fait ces deux attitudes de rentrer dans le mouvement ou de garder un parti indépendant, si elles paraissent contradictoires, ne sont pas antagonistes. Car en prenant l’exemple justement de ce qu’il s’est passé pour la majorité de François Hollande, ceux qui sont dedans peuvent un jour découvrir une situation où l’attitude du Président ou la politique suivie ne leur convient plus, et refaire bascule pour s’entendre avec leurs copains ou leurs anciens copains qui sont restés à l’extérieur. Donc, on revient dans des systèmes de majorité à bascule. C’est-à-dire qu’on revient en fait dans la IVème république.
Tout ce qui est totalement en suspens, ce sont les vrais rapports de force. C’est-à-dire combien y aura-t-il dans « La République en marche », de macroniens pur sucre si je puis dire, combien de Républicains reconvertis vont entrer. Accessoirement, combien y aura-t-il aussi de reconvertis du PS. Et de l’autre côté, à l’extérieur, non pas combien restera-t-il au PS, on sait que c’est peu, mais combien restera-t-il de « Républicains » qui peuvent être loin du groupe principal ou pas si loin, et donc constituer des possibilités de majorité alternative ou pas.
Au premier tour des élections législatives de 1958, M Debré majorité présidentielle UNR avait obtenu 43 % des suffrages et pourtant seulement 35 % des sièges. Mais sans majorité alternative, Charles de Gaulle avait pu alors gouverner avec le CNIP et la SFIO, tout en les laminant à coups de référendums jusqu’aux législatives de 1962 où l’UNR frôlera la majorité absolue et pourra gouverner avec un faible appoint occasionnel.
Donc, soit les élections donnent, comme en 1958, une vague qui ouvre une marge de manœuvre au président Macron, soit l’on reviendra avant 1958. Sans pouvoir atteindre 1962.
Mais Jacques, là vous n’avez pas parlé du « Front national », qui est quand même, et sera très présent pour ces élections législatives.
Alors, « le Front national » est dans une situation paradoxale. Il avait des ambitions qui ont été déçues et sa situation est considérée comme une défaite. Or ce n’est pas une défaite si considérable puisqu’il n’a jamais été aussi haut ! Il est présent en tête dans beaucoup de circonscriptions, plus de 200, il a failli remporter beaucoup plus de départements, en particulier dans notre région puisque dans la Haute-Marne il y a 800 voix d’écart, les Ardennes il y a 2000 voix d’écart. Donc vous divisez par deux et on voit que c’était d’un cheveu. Heureusement, il n’y a pas de scrutin départemental dans les présidentielles. Ce n’est pas si mauvais pour le FN. D’autre part, il est en situation dans un grand nombre de circonscriptions du midi de la France, dans plus d’une cinquantaine/soixantaine, d’être élu s’il y a triangulaire. Donc la question va se poser, qui arrivera en second, « En marche » ou « Les Républicains » ? Y aura-t-il désistement ou pas, ou y aura-t-il impossibilité de se présenter parce que la barre des 12,5 % des inscrits résout la question.
Donc, la situation du « Front national » va être à mon avis, de passer de toute façon au-dessus du groupe parlementaire. Donc d’avoir un peu plus de place. Il peut avoir entre 15 et 60 élus ce qui fait quand même une sérieuse différence. Pour l’instant, il faut quand même voir qu’il a commencé par des bêtises ou par poursuivre ses bêtises, comme d’annoncer un changement de nom et un changement de sigle… entre les présidentielles et les législatives.
Départ de Marion Maréchal-Le Pen qui représentait une ligne quand même…
Oui, mais cela c’est la Scoumoune ! Parce qu’elle ne part pas pour des raisons politiques. Elle ne se met pas en retrait pour des raisons politiques. Cela doit-être une goutte d’eau qui compte dans sa décision, mais elle avait d’autres raisons de ne pas vouloir poursuivre. Pourtant cela tombe très mal puisqu’elle représentait la ligne identitaire intégriste et occident chrétien qui n’est qu’une des trois lignes du FN. Donc cela tombe très mal, plus donc, ce changement de nom annoncé alors qu’il fallait surtout de leur point de vue ne rien faire avant la fin des législatives. Ils vont donc régresser un petit peu. Dans quelles proportions, on ne sait pas. Mais je ne pense pas que ce soit des proportions qui remettent en cause le fait qu’ils arrivent quand même à se faire élire dans un certain nombre d’endroits.
Donc une fois qu’ils auront des parlementaires, ils vont considérer que finalement la situation n’est pas si catastrophique et ils vont commencer aussi à régler leurs comptes pour savoir quelle ligne choisir. On en parlera une autre fois, mais ils ont largement trois lignes entre lesquelles aucun choix n’a été fait jusqu’à présent, ce qui est une des causes de leurs difficultés.
On aura le temps d’y revenir puisque le 1er tour c’est dans 1 mois.
Merci Jacques ! À bientôt !
À bientôt