Jacques HM Cohen 10 3 23
Sur les ondes de RCF: LIEN
Avec nous par téléphone, on retrouve le Professeur Jacques COHEN. Jacques bonjour
Bonjour
On parle aujourd’hui santé. On va parler médicaments et de détournement au sujet fr la pénurie concernant l’Ozempic, un médicament en tout cas d’habitude réservé aux diabétiques. Qu’en est-il réellement si l’on fait une photographie de ce détournement de médicaments, Jacques COHEN ? C’est quoi l’actualité du moment ?
Alors l’Ozempic est en France autorisé comme l’un des traitements du diabète non insulino-dépendant. Donc des diabètes de type II.
Oui, mais pas pour tous. Il est censé être employé après avoir utilisé d’autres traitements plus anciens et moins efficaces, ce qui d’ailleurs est un raisonnement un peu curieux. Il est, d’autre part, très efficace pour faire perdre du poids.

Le semaglutide ( Ozempic ) induit une perte de poids significative
Cela a été remarqué chez les diabétiques de type II qui souvent justement ont commencé par prendre beaucoup de poids. Puis des gens ayant un surpoids, mais pas de diabète, ou pas encore de diabète, parce que leur surpoids est un facteur de risques de pas mal d’ennuis de santé, se sont retrouvés à récupérer de l’Ozempic et celui-ci fait effectivement maigrir, tout à fait spectaculairement. Tout à fait efficacement, sans effort, puisqu’il y a une diminution de l’appétit, et dans plusieurs pays, dont les Etats-Unis, l’Ozempic est prescrit pour l’obésité hors du diabète et même chez l’enfant obèse avec des dosages plus élevés que les dosages donnés aux diabétiques.
En France, il y a eu trois oppositions : la première, ce sont les Autorités de Santé qui avaient autorisé un certain volume, un certain prix etc … et qui voient le médicament poussé à s’envoler en prescription et font pression également sur le fabricant pour qu’il n’y en ait pas plus que ce qui était prévu. Deuxième cas, il y a, j’allais dire les fanatiques, les rigoristes, les intégristes, de l’AMM, c’est à dire « il faut rester aux critères qui ont été définis et validés , Ce n’est pas pour l’obésité ». Sauf que la France n’est pas une île et que l’obésité a été validée dans beaucoup d’endroits. Ces gens-là rajoutent également : « mais il y a plein d’effets secondaires ». Alors, les effets secondaires sont très modestes. Il y a quelque chose chez l’animal pour les tumeurs de la thyroïde, mais qu’on n’a pas vu chez l’homme. ( cf revue Medscape en fin de sujet ). Donc cela a permis que le médicament soit autorisé chez les diabétiques et chez l’obèse dans d’autres pays, ses complications présumées étant connues depuis longtemps. On a ajouté pour faire bon poids des hypoglycémies qui sont fausses puisqu’il y a de l’hypoglycémie avec cette famille de médicament que s’ils sont associés à un autre anti-diabétique. Quand ils sont donnés soit dans le diabète soit dans l’obésité et sans autre médication il n’y a pas d’hypoglycémie. Et puis la troisième attitude, c’est le problème des médecins qui soignent leurs malades et qui trouvent finalement quelque chose qui les fait maigrir, c’est bien, quand c’est un coût raisonnable au point de vue effets secondaires, parce qu’il faut bien rappeler que l’obésité cela donne de l’hypertension, cela donne du diabète, cela donne de l’insuffisance rénale, une stéato-hépatite, etc … une insuffisance cardiaque …. donc un médicament dont le profil coût-bénéfice, y compris dans des obésités isolées, est tout à fait satisfaisant. Mais cela commence à concerner une grande partie de la population. Aux Etats-Unis, en Californie, cela concerne presque la moitié de la population et c’est prescrit et pris, j’allais dire goulûment, à la place des ice-creams et autres saloperies.
Justement, Jacques COHEN puisque vous parlez de prescription, si l’on fait toujours une photographie générale de ce qu’il se passe dans le paysage avec l’Ozempic, est ce qu’il y a des prescriptions hors AMM (autorisation de mise sur le marché), Professeur ?
Eh bien l’essentiel des prescriptions sont hors AMM, puisque l’AMM ne comporte même pas l’obésité chez le diabétique et donc ni l’obésité morbide et encore moins des obésités qui sont courantes dans le paysage qui sont un peu au dessus de 30% d’index corporel. Et cela rejoint le problème plus général des indications hors AMM. Certains intégristes n’imaginent le médicament qu’ayant eu des essais préalables, obtenant l’AMM dessus et qu’on donne sur cette indication là et jamais sur autre chose. Or, tous les médecins savent que de temps en temps on ne s’aperçoit que de façon latérale ou inattendue de l’effet bénéfique d’un médicament hors de son indication, que les négociations financières ou autres entre les autorités de santé et la firme vont durer et que finalement, c’est bien d’avoir un carnet d’ordonnances et de prescrire ce qui est utile, même si on sait qu’au point de vue juridique on n’est pas couvert en cas de pépin. C’est un des risques du métier que je pense qu’il faut savoir prendre en conscience de temps en temps.
Alors, à l’inverse aussi, il y a des détournements. Alors, il y a des détournements bien sûr des opioïdes, tout le monde le sait, mais il y a d’autres détournements. En particulier, il y a des détournements induits par les laboratoires faisant une pression pour qu’on donne leurs médicaments bien en dehors de l’AMM. Alors, cela a été le cas, bien évidemment, d’un autre anti-diabétique qui était le Médiator. Mais là, on est dans du détournement conscient délictueux, a dit la justice, c’est à dire dans l’induction de prescriptions erronées d’un médicament toxique. C’est donc très différent. Si on supprime les indications hors AMM, on aboutit à un système rigide ou tout ce qui n’est pas interdit est obligatoire et réciproquement. Et comme vous savez, la santé, c’est quelque chose de plus fluctuant que cela.
Justement Jacques COHEN, vous venez de parler de médicaments toxiques pour reprendre les points que vous développiez en introduction concernant l’Ozempic, il y a des inconvénients à prendre ce médicament ?
Pas beaucoup, peut-être, éventuellement, le cancer médullaire de la thyroïde, mais c’est un cancer lent et qu’on détecte bien et, pour l’instant, ce n’est arrivé à personne. D’avoir quelques nausées, même pas de vomissements mais sans plus, et un peu de diarrhée, parfois. On a guère eu des effets secondaires, il y a d’ailleurs un paramètre important c’est que les médicaments qui ont des effets secondaires, même pas forcément graves, mais désagréables, les gens ne les prennent pas et là, beaucoup de gens réclament ce médicament.
Au passage, il y a d’autres produits de la même famille. D’abord, il y en a un qui a mis la puce à l’oreille, mais il demandait une injection non pas une fois par semaine mais une injection par jour. Donc c’est quand même beaucoup plus lourd, beaucoup plus désagréable et cela n’a pas beaucoup pris, mais peut-être que devant la pénurie d’Ozempic, des gens vont se rabattre à nouveau sur le Victoza pour lequel je ne fais pas de publicité gratuite, bien sûr. Il y a d’autres médicaments en attente. En particulier, il y a deux familles modernes, les gliptines et les glutides. Il y a un autre médicament qui a les deux effets, qui n’est pas encore autorisé en France, mais cela ne devrait quand même pas trop tarder. Et puis, il y a l’association des deux qui a un effet et certains de ces produits vont être prescrits dans bien d’autres indications. Par exemple, l’un d’entre eux à un effet reconnu sur l’insuffisance cardiaque en dehors de l’obésité et du diabète, accessoirement. Donc vous voyez que ce sont des familles qui sont promises à un grand avenir, et que je crois que le combat pour réduire leur distribution aux obèses est un combat de retardement qui n’a pas grand intérêt médical.
Et d’ailleurs, ce n’est pas la première fois qu’il y a un ennui de ce genre. La dernière fois, cela s’est très mal terminé pour le médicament et à mon avis, pour les malades. C’est un antagoniste de l’un des récepteurs du cannabis, le Rimonabant que distribuait Sanofi qui était commercialisé et qui a été retiré parce qu’il y a eu un certain nombre de suicides. Mais en fait les suicides étaient la rançon de l’efficacité. Les essais avaient été fait sur une population de grandes obésités et quand on fait maigrir les baleines et bien, elles se suicident même si on les fait maigrir par un procédé chirurgical. Ce n’est pas lié au médicament en tant que produit, principe actif. Et assez curieusement, la firme Sanofi s’est très peu défendue parce que cela tombait en même temps qu’une révolution de palais où cela a permis de faire dégager le Directeur Général qui était français et d’installer un Directeur Général américain qui a pu entreprendre un certain nombre d’opérations de captation sur, par exemple, le portefeuille de brevets de Sanofi, qui fait qu’aujourd’hui beaucoup de gens pensent que c’est une boite française, mais ses points névralgiques de décisions ne sont plus chez nous.
Jacques COHEN, juste un dernier mot, comment se fait-il que ce médicament qui existait avant déjà dans l’univers des médicaments, se retrouve mis sur le devant de la scène, d’un coup comme cela en quelques jours ?
Parce que c’est toujours la même chose, c’est le délai pour d’une part pour que le phénomène s’amplifie et en particulier, on a des tentatives de gens d’Afrique du Nord d’obtenir ce produit dont ils ont d’ailleurs bien besoin, car ce sont des pays où il y a beaucoup d’obèses et beaucoup de prédiabétiques, parce que pendant des siècles, ils ont accumulé des gênes qui permettent de s’empiffrer de temps en temps, ce qui était bien utile en situation de pénurie. Car ils en avaient rarement l’occasion, et maintenant ces gênes les conduisent rapidement à des diabètes. Donc il faudrait tout à fait que ce médicament soit diffusé en Afrique du Nord et comme il ne l’est pas ou très cher, un certain nombre de personnes essaient d’obtenir des ordonnances pour avoir ce médicament en France ou carrément à la pharmacie, je vous épargne les détails, mais en gros, c’est cette demande-là qui a fait exploser la pression en France, alors que, je vous le répète, aux Etats-Unis et en particulier, en Californie, c’est devenu un blockbuster, comme on dit en jargon pharmaceutique, sans aucun problème pour une population autochtone et un peu grassouillette.
Jacques COHEN, avant de vous laisser filer et malgré tout, il me reste une dernière interrogation, le titre que vous avez choisi cette semaine, Ozempic : rôtir en enfer dans sa graisse ? Vous posez cette question qui reste assez curieuse ?
Il est un peu curieux, mais c’est un raisonnement qui est le soubassement d’un certain nombre d’oppositions à ce médicament, c’est un raisonnement de morale Judéo-chrétienne qui est forcément masochiste. On ne peut pas se faire du bien sans que cela ne fasse de mal. Cela ne serait pas bien. Donc effectivement comme l’affaire du Rimonabant, l’affaire de l’Ozempic, c’est qu’il y a une réticence à ce qu’un médicament procure un bien-être et un bien-être également pour la santé, sans qu’il n’y ait d’inconvénients majeurs. Et surtout, sans qu’il implique une peine et une discipline, etc … et donc le bonheur sans pénitence, c’est finalement quelque chose qu’on a encore du mal à admettre dans notre pays.
Eh bien merci de nous avoir expliqué en quelques mots Jacques COHEN ce titre Ozempic : rôtir en enfer dans sa graisse, c’est la question qui est posée, vous l’expliquerez davantage dans votre blog jhmcohen.com. A très bientôt Professeur.
A très bientôt.
Article effets secondaires Medscape :
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Rachel Pessah-Pollack.
TikTok’s Fave Weight Loss Drugs: Link to Thyroid Cancer? – Medscape – Mar 15, 2023.
With #Ozempic and #ozempicweightloss continuing to trend on social media, along with the mainstream media focusing on celebrities who rely on Ozempic (semaglutide) for weight loss, the daily requests for this new medication have been increasing.
Rachel Pessah-Pollack, MD
Accompanying these requests are concerns and questions about potential risks, including this most recent message from one of my patients: « Dr. P – I saw the warnings. Is this medication going to make me get thyroid cancer? Please let me know! »
Let’s look at what we know to date, including recent studies, and how to advise our patients on this very hot topic.
Using GLP-1 Receptor Agonists for Obesity
As endocrinologists, we have extensive prior experience with glucagon-like peptide 1 (GLP-1) receptor agonists, such as semaglutide, for treating type 2 diabetes and now recently as agents for weight loss.
Over a decade ago, a study examining the FDA’s database of reported adverse events found an increased risk for thyroid cancer in patients treated with exenatide, another GLP-1 agonist. The reporting system wasn’t designed to distinguish thyroid cancer subtypes.
Numerous subsequent studies didn’t confirm this relationship. The LEADER trial looked at liraglutide in patients with type 2 diabetes and showed no effect of GLP-1 receptor activation on human serum calcitonin levels, C-cell proliferation, or C-cell malignancy. Similarly, a large meta-analysis in patients with type 2 diabetes didn’t find a statistically increased risk for thyroid cancer with liraglutide, and no thyroid malignancies were reported with exenatide.
Two US administrative databases from commercial health plans (a retrospective cohort study and a nested case-control study) compared type 2 diabetes patients who were taking exenatide vs other antidiabetic drugs and found that exenatide was not significantly associated with an increased risk for thyroid cancer.
And a recent meta-analysis of 45 trials showed no significant effects on the occurrence of thyroid cancer with GLP-1 receptor agonists. Of note, it did find an increased risk for overall thyroid disorders, although there was no clear statistically significant finding pointing to a specific thyroid disorder.
Differing from prior studies, a recent nationwide French healthcare system study provided newer data suggesting a moderate increased risk for thyroid cancer in a cohort of patients with type 2 diabetes who were taking GLP-1 agonists. The increase in relative risk was noted for all types of thyroid cancer in patients using GLP-1 receptor agonists for 1-3 years.
An accompanying commentary by Caroline Thompson and Til Stürmer provides perspective on this study’s potential limitations. These include detection bias, as the study results focused only on the statistically significant data. Also discussed were limitations to the case-control design, issues with claims-based tumor type classification (unavailability of surgical pathology), and an inability to adjust for family history and obesity, which is a risk factor alone for thyroid cancer. There was also no adjustment for exposure to head/neck radiation.
While this study has important findings to consider, it deserves further investigation, with future studies linking data to tumor registry data before a change is made in clinical practice.
No clear relationship has been drawn between GLP-1 receptor agonists and thyroid cancer in humans. Numerous confounding factors limit the data. Studies generally don’t specify the type of thyroid cancer, and they lump medullary thyroid cancer, the rarest form, with papillary thyroid cancer.
Is a detection bias present where weight loss makes nodules more visible on the neck among those treated with GLP-1 agonists? And/or are patients treated with GLP-1 agonists being screened more stringently for thyroid nodules and/or cancer?
How to Advise Our Patients and Respond to the EMR Messages?
The TikTok videos may continue, the celebrity chatter may increase, and we, as physicians, will continue to look to real-world data with randomized controlled trials to tailor our decision-making and guide our patients.
It’s prudent to advise patients that if they have a personal or family history of medullary thyroid cancer or multiple endocrine neoplasia syndrome type 2, in particular, they should avoid using this class of medication. Thyroid cancer remains a rare outcome, and GLP-1 receptor agonists remain a very important and beneficial treatment option for the right patient.