Les gilets jaunes refleuriront-ils au printemps ?

CHRONIQUE du jeudi 13 décembre 2018

Sur les ondes de RCF: @lien en attente

Vous allez nous parler des gilets jaunes, la suite. Emmanuel Macron est venu s’exprimer devant les Français, c’était lundi soir. Un discours dans lequel il a fait de nombreuses annonces, notamment la hausse du SMIC ou en tout cas de la prime d’activité. Il a fait d’autres annonces, l’annulation de la CSG pour les retraités qui gagnaient moins de 2000 € par mois. Quelles sont les conséquences de ces annonces du Président Emmanuel Macron ?

Et bien, Emmanuel Macron a essayé de faire comme en 1968, c’est-à-dire « on lâche de l’argent de différentes façons et cela devrait calmer les gilets jaunes ». Le problème est que cet argent qui est distribué, il faudra bien le prendre quelque part. Alors, en 68, on avait un peu le temps. On a pu mettre 2 ans, grâce à l’inflation, à récupérer un peu de ce qui avait été lâché, et puis une partie restait acquise parce que la croissance a permis de la consolider et au contraire, de s’en servir. Là, on est dans une situation totalement différente. Si on reste en l’état, avec des dépenses accrues d’une bonne dizaine de milliards et un déficit budgétaire qui va passer à 3,5, on aura une situation que l’on va payer à très court terme, à peu près à 6 mois. Donc, il est inéluctable que le gouvernement et Bercy s’efforcent de récupérer de l’argent beaucoup plus vite, et probablement dès les hausses de janvier.

De ce point de vue, effectivement, Emmanuel Macron est un peu « échec et mat » parce qu’il avait été élu pour faire des réformes, lesquelles devaient comporter des réformes conduisant à des économies, mais pas très rapidement, devaient comporter une réduction de la dépense publique, devaient comporter une incitation à la compétitivité des entreprises. Or, on constate qu’il a mis beaucoup d’argent en direction des entreprises, mais malheureusement distribué plutôt à l’instigation du MEDEF que des entreprises réellement exportatrices et performantes, que les réformes de structure ne sont pas allées très loin parce qu’elles sont faites de façon à ne fâcher personne, ce qui n’est guère une solution pour des réformes, et qu’on aboutit également là-dessus aussi à une impasse, qu’on a pris de l’argent surtout aux pauvres – c’est normal, ils sont plus nombreux – Mais maintenant, Emmanuel Macron va être devant une situation très difficile. Où va-t-il prendre de l’argent en janvier-février ? Devra-t-il ou acceptera-t-il de toucher à ses totems et en particulier de toucher plutôt à des gens très favorisés plutôt qu’à l’ensemble de la population et à l’ensemble des travailleurs qui se sont retrouvés avec un gilet jaune ? Donc là, c’est un peu délicat parce que ce que l’on peut craindre, c’est qu’on ait, là, jusqu’à la fin de l’année ou plutôt jusqu’avant Noël, quelques mouvements sporadiques encore, qu’après on aura la trêve des confiseurs qui est vraiment quelque chose de sacré en France. Puis qu’on va ensuite voir arriver des mesures créant des recettes, et ces mesures ont toute chance d’être assez mal perçues.

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JC, vous êtes en train de nous dire que le Président de la République et son gouvernement évidemment, vont avoir besoin de faire rentrer de l’argent dans les caisses ?

C’est indispensable.

La difficulté est de savoir à qui on va prendre cet argent.

Exactement, parce qu’après en avoir dépensé pas mal, il faut en trouver quelque part et si on doit en reprendre chez tout le monde, ceux qui auront touché un petit quelque chose vont se retrouver dépossédés rapidement de ce qu’ils venaient de toucher. Et le numéro de ce que j’appelle d’habitude le bonneteau, c’est-à-dire le jeu du dé et des 3 godets…

Que l’on voit souvent à Barbès à Paris.

Oui, ne va pas pouvoir se renouveler à nouveau vu l’exaspération des gilets jaunes qui ne vont, si j’ose dire, rentrer à la maison au chaud que parce que c’est Noël.

Et là, JC, vous avez peut-être envie de nous faire partager un petit moment.

Oui, je crois que, je vais faire un peu de météo. Le plus probable, ce qu’il risque de se passer, c’est qu’après des cadeaux de Noël, s’ils doivent être récupérés avant Pâques, les gens ne seront pas très contents. Et cela risque de correspondre aux deux vers de Brel dans le plat pays » [quand les fils de novembre nous reviennent en mai, quand la plaine est fumante et tremble sous juillet…] car là, on retomberait dans la chronologie habituelle des mouvements massifs en France. Il faut bien se rappeler qu’au mois de décembre, cela n’est jamais arrivé d’avoir un mouvement de masse. On est un peu dans le changement climatique. Il y a eu nombre de mouvements, de nombreuses choses importantes en France en décembre, surtout le 2 décembre à répétition, mais ce sont des modifications institutionnelles. Des manifestations de masse en décembre, cela n’existait pas, c’est une nouveauté. En revanche, le calendrier risque de revenir à des choses plus traditionnelles en constatant à la fin du printemps que le tour de passe-passe est à nouveau proposé et que le compte n’y est pas.

JC, vous avez employé vous-même le mot dans cette chronique, vous avez parlé d’une impasse. Cela veut dire que la situation va s’apaiser dans les semaines à venir, avant de reprendre de plus belle peut-être dans quelques mois ?

De plus belle, je ne sais pas, mais il me semble impossible qu’une solution soit mise en place et soit efficace dans d’aussi courts délais. Après avoir lâché beaucoup d’argent, même si c’est sans contrepartie d’équilibre budgétaire, il n’est pas possible de rectifier les réformes mal faites et de leur voir produire quelque chose en termes d’économie en aussi peu de temps. Donc ce sont des ressources impossibles. Après, la compétitivité ne s’est pas accrue au point de ramener des recettes ; j’ai même l’impression qu’elle ne s’est pas beaucoup accrue. Il ne reste que l’éternelle solution qui est de prélever sur l’ensemble des Français ou sur une partie d’entre eux. Alors, si Emmanuel Macron brise ou brûle ses totems en prenant aux très riches, la population pourrait être calmée, mais c’est assez peu probable.

Je vais vous prendre un exemple de réforme qui n’a pas donné d’économie sérieuse et qui date d’avant Emmanuel Macron. On a changé les régions, on a fait de très grandes régions, ce qui avait des avantages et des inconvénients, mais l’un des avantages possibles étaient les économies, or, on a fait attention à ne pas réduire d’un seul fonctionnaire, d’un seul centime les dépenses des nouvelles grandes régions à la place des anciennes. Tout cela est un exemple des réformes faites en contentant tout le monde, c’est strictement impossible.

JC, il nous reste quelques instants ensembles. On parle bien évidemment de l’impact direct sur la population, mais également la France, ce que cela coûte en économie. Il va y avoir peut être maintenant, des dommages vis-à-vis de l’Europe.

Déjà, nous étions partis sur un déficit budgétaire entre 2,5 et 2,8, et là, il va passer vers 3,5. Alors, ces 2,5 et 2,8 étaient en dessous des 3 de la convergence annoncée par l’Europe, mais…

Qu’Emmanuel Macron avait promis.

mais surtout, tous les autres pays d’Europe pour l’essentiel étaient passés autour de 1 grâce à de la croissance. À partir du moment où nous, nous étions un peu en retard du peloton, mais que nous choisissons la roue libre, nous serons totalement largués du peloton et cela va se payer sur un certain nombre de choses, dont les taux d’intérêts qui nous seront faits pour les emprunts internationaux.

Merci, JC, on aura certainement l’occasion d’en reparler à travers d’autres chroniques d’actualité. Merci d’avoir été avec nous ce jeudi soir.

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