JHM COHEN
Chronique du 05 janvier 2023
Sur les ondes de RCF: LIEN
La chronique d’actualité avec le professeur Jacques Cohen que l’on retrouve par téléphone. Bonjour.
Bonjour.
Et meilleurs vœux pour cette nouvelle année professeur.
Meilleurs vœux.
Généralement on souhaite une bonne année, une bonne santé. Et la santé justement, c’est la Covid-19, il faut en parler de cette Covid qui se déclenche de nouveau du côté de la Chine.
Oui la santé c’est le virus, ce n’est pas le seul souci pour la santé, mais le virus en fait partie. La situation en Chine est assez mal perçue parce qu’il y a des présupposés idéologiques ou des pressions politiques. En quelque sorte, quoi que fasse la Chine elle est toujours critiquée depuis les États-Unis, que ce soit parce qu’elle enferme trop ou qu’elle n’enferme pas assez. Le discours négativiste est qu’ils ont trop enfermé, puis qu’ils ont le mauvais vaccin et que le virus a fini par se glisser quand même et que maintenant ils ont relâché toutes mesures de protection et ils laissent le virus revenir en Occident, tout cela c’est une position idéologique.

En début d’épidémie de Covid19, construction d’un hôpital en 10 jours à Wuhan à partir des stocks prépositionnés.
On va voir que la situation n’est pas du tout celle-là. Le gouvernement chinois a choisi une politique extrêmement ferme initialement, à un coût économique considérable, d’éviter la diffusion du virus. À vrai dire, on ne croyait pas tellement qu’il allait y arriver, et pourtant, c’est bien ce qu’il s’est passé. Au bout d’un certain temps, deux choses se sont passés, d’une part que les gens ont commencé à trouver que cela faisait long en Chine, et d’autre part que le virus a évolué en dehors de Chine et c’est ce deuxième élément qui est le plus important. Le virus comme vous le savez a évolué, il est devenu beaucoup plus contagieux et accessoirement, si l’on peut dire, beaucoup moins méchant. À ce moment-là, les Chinois ont considéré qu’ils allaient pouvoir changer de tactique avec un incident qui est qu’ils considéraient qu’il fallait qu’ils aient terminé la vaccination de la population et ils se sont rendus compte de justesse que celle des personnes âgées à la campagne n’était pas faite. Et donc alors qu’à mon avis ils avaient prévu de lâcher immédiatement derrière le congrès du parti communiste chinois, il a été décidé de reporter de 3 ou 4 mois. Mais, le fait qu’on allait relâcher commençait à se savoir et donc les populations n’en pouvaient plus, et il y avait que quelques incidents il a fallu lâcher plus vite et un peu plus en débâcle que ce n’était prévu. Alors que se passe-t-il à ce moment-là ? Et bien, sur plus d’un milliard d’habitants il y a une épidémie massive qui se répand comme une trainée de poudre avec des dizaines et des centaines de millions de cas en très peu de temps, ce qui comporte inévitablement une mortalité. Est-ce que cette mortalité est à l’échelle de celle initiale du virus ? Certainement pas, parce que si j’ose dire, cela se verrait. Elle n’est pas négligeable parce qu’elle est à l’échelle de ce que les variants actuelles font, c’est-à-dire de précipiter les personnes fragiles et âgées vers leur décès ou de s’attaquer à des sujets ayant des facteurs de risques particuliers de type diabète, déficit immunitaire naturel ou acquis en particulier par chimiothérapie, etc… Donc il va y avoir pas mal de morts en Chine, mais à une échelle vis-à-vis du pays qui sera inférieur à ce qu’on a connu chez nous puisqu’on a plus affaire à des variants aussi méchants.
Alors cela c’est déjà un point notable, mais qu’elles sont les conséquences d’un tel réservoir, d’une telle explosion de cas ? Et bien, cela va permettre d’abord une diffusion très rapide dans une population sans immunité naturelle, quoiqu’elle soit vaccinée, puis l’émergence de variants, bien évidemment. Et ces variants, ils sont dans tous les sens, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas de raisons d’être plus ou moins méchants que ce qu’on a observé sur le reste de la planète. Néanmoins, comme ce seront de nouveaux variants, ils vont accélérer l’histoire naturelle de la maladie et se répandre en occident.
Alors les mesures qui ont été prises de contrôle aux frontières sont une plaisanterie, parce que des variants de contagiosité actuelle qui n’ont pas pu être contenus par les mesures chinoises il y a 6 mois n’ont aucune chance d’être arrêtés par des mesurettes aux aéroports en Occident. Et le seul point qu’on peut en déduire c’est que c’est une guerre économique destinée à pourrir la vie des Chinois, et à moyen terme on va s’apercevoir que si on continue cette mauvaise plaisanterie c’est notre tourisme qui va en pâtir parce qu’on espérait bien voir revenir les touristes chinois. Donc, il ne faut pas imaginer que ces variants Chinois représentent une nouvelle donne complète, ce n’est que 15 % de la population du globe qui va être infecté de façon décalée.
Donc on n’est pas à un retour à la case départ, finalement JC.
Oui et non. On n’est pas à un retour à la case départ avec une épidémie méchante, on est à un retour à la case départ d’avant. C’est-à-dire que de très nombreuses épidémies de virus bénins se sont répandues sur la planète, souvent à partir de l’Asie du Sud-Est pour des grippes. Finalement on est dans le cas d’avant l’épidémie et d’avant ce virus étonnant sorti à Wuhan qui avait un extraordinaire compromis entre sa contagiosité et sa mortalité qui en ont fait un sujet de préoccupation de santé publique mondiale. D’habitude soit un virus est plus méchant et cela fait une épidémie limitée, cela s’était déjà passé. Soit-il est d’emblée bénin on s’en fout complètement pour parler vulgairement. Donc là, on est ramené à une case départ qui est un départ d’avant cette épidémie inhabituelle.
Donc, on a ensuite une question naturelle, mais alors cela n’en finit pas, que va-t-il se passer ? D’ailleurs, il y a des variants sans arrêt, il y en a un qui se répand très vite en occident depuis à peu près un mois, surtout aux États-Unis d’ailleurs, c’est un variant qui est né en Inde, je vous épargne les numéros qui sont impossibles à retenir de tous ces nouveaux variants, car ce n’est pas le seul, mais ils sont tous issus de la branche Omicron. Et cette branche fait qu’ils sont de plus en plus contagieux et pas plus méchants que les autres Omicrons pour l’instant. Vous savez qu’à long terme, moi j’attends le variant bénin et éradicateur des autres qui clôturera cette histoire. Bénin, parce que moins méchant, éradicateur c’est plus difficile à comprendre. %ais imaginez qu’il y a des arbres qui sont parfaitement capables d’empêcher toute végétation à leurs pieds. Or, pour qu’un virus devienne quelque chose de bénin et stable, il ne faut pas qu’il continue à être concurrencé par des variants. Et donc il faut qu’il soit un peu impérialiste et capable d’éradiquer les autres variants, non seulement en donnant une épidémie, mais en faisant le ménage. C’est donc généralement ce qu’il se passe sur le long terme. Alors, il peut y avoir des dents-de-scie avec un variant qui soit parfois plus méchant, même il peut y avoir un très méchant qui liquiderait les autres variants et se suiciderait du fait de sa trop grande mortalité. Ce n’est pas l’hypothèse la plus probable celle du bouquet final, mais elle ne peut pas être exclue, de même que les dents-de-scie. Alors il y a une conséquence immédiate de tout cela, c’est la question de l’immunité acquise naturelle par l’infection ou vaccinale, et ce qu’elle donne. Manifestement, sur ces variants, depuis déjà 6 mois, il faut bien reconnaître que les immunités ne donnent pas grand-chose. D’abord parce qu’on peut le rattraper, parce qu’en cherchant bien on arrive à trouver un effet des vaccins pendant 3 mois, tout cela est assez marginal. On ne sait pas pourquoi les vaccins donnent une protection contre les formes graves de façon fugitive, ce n’est probablement pas par l’immunité spécifique, puisqu’on a vu qu’elle ne donne rien. C’est un sujet qui est d’ailleurs à creuser, mais pour l’instant la seule chose qu’on ait c’est de se dire que jusqu’à présent les vaccins ont protégé des formes graves. Rien ne dit que ce sera toujours le cas variant par variant, mais si ces nouveaux variants sont par eux-mêmes bénins ce n’est pas bien grave que les actions qu’on entreprend ne donnent pas grand-chose. D’ailleurs au passage, avec les infections multiples de la population du globe, puis les vaccinations, il va être de plus en plus difficile de prouver l’action ou pas d’action de ces vaccins. L’important c’est de les suivre, parce que si nous avions un variant méchant – et je vous ai dit que ce n’était pas totalement exclu dans le feu d’artifice des variants -, il faudrait prendre des mesures beaucoup plus sérieuses que ce que l’on fait actuellement. À l’inverse, il n’est pas utile de paralyser toute activité quand on a une maladie relativement bénigne. Le point qui est assez délicat c’est celui de la protection des sujets fragiles, les médicaments ont l’air de mettre beaucoup plus de temps à se développer et même ceux dont on dispose on ne les utilise pas complètement ce qui est dommage. Et les anticorps ne marchent plus parce que les variants changent sans arrêt, donc pour les personnes fragiles le problème c’est qu’on ne peut pas les mettre sous verre, les enfermer indéfiniment, et la protection normale c’est de réduire la circulation des virus par les mesures de protection dans la population générale pour protéger cette petite population. Là manifestement, on en a marre, on a choisi de renoncer à cette protection. Il faut savoir que c’est une façon d’abandonner à leur sort une population fragile qui n’est pas négligeable si on tient compte de tous les traitements anticancéreux ou traitement des maladies auto-immunes que l’on fait ou des transplantés. C’est quand même un bémol à un état d’esprit que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Certainement que vous auriez eu d’autres choses à dire, professeur. Mais le temps est toujours compté, même en 2023 sur l’antenne de RCF. En tout cas, on vous remercie de nous avoir éclairés sur la Covid en Chine et son développement également en occident. À très bientôt professeur.
À très bientôt.