Jacques HM Cohen 15 août 2021
Si la vaccination est un outil primordial de lutte contre la pandémie de covid19, ses limites conduisent à se pencher sur la politique d’emploi des différents tests de détection du virus, des traces de son passage, ou de l’état de l’immunité naturelle ou vaccinale anti-sarsCov2 d’un sujet. Ces tests sont insuffisamment ou surtout mal-employés alors qu’ils devraient être eux-aussi des armes majeures contre la pandémie.
Les tests étant de nature très différentes, il convient de reprendre un à un leurs propriétés, performances et potentiel.
tests génomiques
Les tests génomiques sont les plus sensibles pour détecter la présence du virus. Ils le sont même parfois un peu trop quand ils détectent des virus morts subsistants dans des expectorations de débris pulmonaires, à l’image d’une peau qui pèle bien après le coup de soleil. Mais leur appréciation quantitative permet de faire le tri. Les tests les plus courants sont des tests pcr nécessitant un appareillage et des précautions particulières. Ils sont en France prélevés dans des labos du coin de la rue et centralisés dans des labos privés de regroupement de taille intermédiaire. Ce qui nous prive d’une « force de frappe » à haut débit pour couvrir une ville ou un département avec des structures capables de réaliser chacune un million de tests par semaine.
Les tests génomiques isothermiques ( lamp, crisp,… ) ne nécessitent pas une instrumentation complexe. Ils pourraient être décentralisés jusqu’à des auto-tests tout en restant d’un sensibilité équivalente à celle des tests pcr. Ils sont peu utilisés en France et même récemment déremboursés suivant le voeu de l’HAS en confondant tests et modalités de prélèvement. Car ils ont été commercialisés comme tests salivaires. En prélèvement nasal, écouvillon ou rinçage, leur sensibilité est équivalente à celle des pcr. Leur handicap est d’échapper au lobby des labos privés contrairement aux tests antigéniques.
Les séquences directes associées au diagnostic sont parfaitement réalisables en NGS et les généticiens qui disposent des machines et savoir-faire ont tenté de les obtenir mais se sont fait écarter par l’alliance inédite des labos privés et des centres de référence virologiques académiques.
Les coûts des tests génomiques sont le résultat là aussi d’un lobbying efficace qui nourrit toute la chaîne à partir du fabricant, de 3 à 10 fois supérieur à celui d’une dose de vaccin. A échelle massive pour une détection permanente généralisée, on pourrait viser des coûts unitaires de 5€.
tests antigéniques
Les tests antigéniques sont confiés aux pharmaciens d’officine sans conflit avec les labos de ville car on peut résumer leur utilité en disant que chez un sujet contact lorsqu’ils sont positifs, il faut les refaire ne serait ce que pour typer la souche, et quand ils sont négatifs ils faut les refaire parce qu’ils ne sont pas assez sensibles. En fait, si le jour des signes cliniques ils sont positifs dans un peu plus de la moitié des cas, sur un public tout venant, ils ne le sont que dans un tiers des cas.
Il y a cependant un créneau où ils pourraient être utiles: les tests systématiques 2 fois par semaine. en effet la charge virale étant plus importante dans les 2 jours précédant les signes cliniques, les tests antigéniques pourraient là avoir un rendement utile écrémant jusqu’au 2/3 des cas.
Tests anticorps
Le recherche des anticorps anti sarscov2 a initialement beaucoup déçu. Nombre de sujets guéris du virus n’en ont pas, surtout après un portage asymptomatique. La persistance des anticorps est variable, de moins de 6 mois pour un bon tiers des sujets symptomatiques. Il y a pourtant là aussi des situations où la recherche des anticorps pourrait rendre service: le suivi des anciens patients et celui des vaccinés. Il est possible d’ailleurs de distinguer les anticorps anti spike induits par les vaccins ( sauf virus entier mais nous n’en avons pas ) des anticorps naturels. Il existe aussi des tests fonctionnels d’inhibition virale, sans doute plus représentatifs de l’immunité efficace. Ils ne nécessitent plus l’usage de virus infectieux mais n’ont pas encore eux non plus été adaptés à des tests de masse. ( revue rapide dans le matériel et method de cet article )

Optimisation d’un exemple parmi d’autres de test sensible « décentralisable » avec lecture sur smartphone. Science Advances 08 Jan 2021: Vol. 7, no. 2, eabe3703 DOI: 10.1126/sciadv.abe3703
Il faut noter que des tests spécifiques de tel ou tel variant seraient réalisables et souhaitables, mais ne sont pas disponibles en routine clinique. Faute d’incitation des pouvoirs publics vis-à-vis des fabricants de tests et de leurs clients.
Pour une politique de tests viraux systématiques et non devant des signes cliniques La cinétique virale…
Les tests en France sont pratiqués devant une suspicion clinique, ou un contact connu. Ils ne peuvent donc concerner qu’une fraction marginale de la circulation virale puisque 80% des contaminés sont asymptomatiques. De plus, c’est avant d’être malade, que pendant 2 à 3 jours, les nouveaux contaminés sont le plus contagieux. C’est d’ailleurs sur ce pic viral pré-clinique que le variant Delta a été considéré comme particulièrement contaminant. ( Même si crédité d’une efficacité de plus de 1000 fois supérieure à la souche initiale par des gens ignorant que le signal d’une pcr est par définition exponentiel. Deux à 6 fois, c’est déjà beaucoup ! ). Donc seuls des tests « coiffant » toute une population un jour donné, voire 2 fois à 8 jours d’intervalle, ou des tests réguliers 2x par semaine, ont une chance d’un dépistage significatif pour écraser l’épidémie, pour peu que les sujets dépistés soient isolés convenablement.
Pour une politique de tests anticorps précisant les indications vaccinales
A une époque où on parle de médecine de précision, il serait souhaitable de conditionner les injections supplémentaires de vaccin pour les anciens malades au niveau d’immunité observée chez eux par des tests anticorps, évitant ainsi le risque de réactions exagérées chez des sujets restés largement réactifs et en fait protégés. A l’opposé, le suivi des trop faibles répondeurs et le succès de leur immunisation itérative devrait être ainsi vérifié.
La durée d’immunité vaccinale de tout un chacun et sa largeur vis-à-vis de tel variant pourraient être vérifiés pour définir des rappels utiles, plutôt que systématiques après un délai statistique qui fait penser à l’injection vaccinale de rappel automatique autrefois à l’incorporation des conscrits. Ceci prendra de l’importance quand nous disposerons de vaccins tués à plus faible réactivité parasite que les vaccins rna, mais vis-à-vis desquels la réponse de la population n’est pas homogène, justifiant 3 doses pour certains.