Faire la guerre au Covid-19 avec des bandes molletières…

Alors que la réorganisation générale des hôpitaux face au Covid se met en place, nous continuons à peiner dans la guerre de mouvement qui devrait déplacer des personnels vers les zone de pics épidémiques, ou au contraire des malades vers des zones moins surchargées. Les noria d’hélicoptères sont moins médiatisées que notre A330 à 6 places. Et font difficilement le travail que 2 ou 3 trains sanitaires réaliseraient aisément.

Mais notre principale faiblesse vient de l’insuffisance quantitative mais aussi qualitative du matériel.

Quiconque voit des images de structures d’accueil étrangères d’Israël au Pérou ne peut que les comparer aux blouses et  masques utilisés chez nous qui sont souvent du niveau de l’équipement des aide-soignantes pour nettoyer les patients qui font sous eux en ephad. On peut d’ailleurs se demander dans quel bunker profond se trouvent nos tenues NBC quand les Russes emploient leur équivalent pour les personnels des « drive-through » de dépistage.

Quand les brouillards désinfectants vont ailleurs des canons couvrant toute la largeur d’une rue à un équipement portatif traitant inlassablement les sols, surfaces et portes dans l’hôpital, nos personnels passent quelques lingettes. Car ces équipements n’existent pas dans nos hôpitaux. Alors que l’agro-alimentaire les utilisent abondamment et pourrait les prêter.

Les pédiluves désinfectants, barrière à chaque porte ou coupe-feu dans les couloirs n’ont été mis en place quasi nulle part. Ni leur succédané dans les épidémies du tiers monde d’une serpillière imprégnée de Javel sur laquelle il faut marcher.

La pénurie de masques a eu des conséquences extra-hospitalières de refuser la généralisation des masques dans tout contact inter-humain telle que pratiquée en Asie. Elle nous a conduit à être le seul pays d’Europe qui n’en équipe pas ses policiers. Mais elle a aussi des conséquences dans le système de santé. Où certains ont gobé de doctes explications sur l’inutilité des masques hors soins directs de patients estampillés Covid. Explications présentées comme parfaitement scientifiques alors qu’elles n’étaient que le cache-misère de notre pénurie, décérébrants et désarmant les personnels hospitaliers. Récité du haut en bas de la cascade de santé publique et hygiène hospitalière ce conte pour enfants privés de masques qu’on veut pourtant rassurer, a fait trop de dupes. Et des dégâts.

Les blouses habituelles étant passées à manche courtes pour encore des raisons d’économie, sans dotation simultanée de pyjamas, ont conduit sous la blouse au port de vêtements civils à manches longues apparentes, look « grunge médical » qui est une insulte à la mémoire de Louis Pasteur qui avait obtenu que les sœurs hospitalières retroussent leurs manches ( montrant leurs bras nus! ) pour se laver les mains et donner des soins.

La conséquence directe de ces manquements et mensonges est que le personnel de santé, bien avant l’explosion épidémique, est devenu vecteur de dissémination et les hôpitaux des sites potentiels de foyers épidémiques précoces. La contamination du personnel en de nombreux endroits est survenue dès la phase des cas sporadiques, bien avant la phase épidémique. Une conséquence simple est prévisible: lors de celle-ci un  bon tiers des personnels sera sur le flanc ne pouvant travailler et, si l’on peut dire accessoirement, les pertes humaines auront un effet démoralisant sur certains personnels sans vocation de martyrs, qui ne voudront plus combattre sans équipements.

Par analogie avec Mai et Juin 1940, devant la guerre éclair du Covid, nous avons déjà eu l’enfoncement des frontières, l’exode, et nous risquons la débâcle et ses fuyards. La pénurie de masque ayant engendré le vol et le marché noir, ne pourra être comblée par le simple apport des quantités nécessaires qui vont être thésaurisées voire revendues. Il faudra une inondation de masques à 5 fois les besoins pour casser la psychose collective et les mauvaises habitudes réminiscentes.

En attendant, des personnels contraints à ne pas  boire pendant 4 heures pour ne pas changer trop souvent de masques à économiser sont conduits au plus vite à l’épuisement. Des bricolages ont vu le jour ça et là, de passer les masques aux UV ou, souvenir de missions humanitaires autrefois, au sèche-cheveux, pour pouvoir les réutiliser. 

Si les masques FFP2 sont la pénurie la plus visible. Les casaques, visières, lunettes etc… manquent autant dans des hôpitaux dont les commandes ont été depuis une dizaine d’années organisées (ou désorganisées ) pour faire des économies par leur lenteur et leur parcimonie comme leur flux tendu.

Dans le grand élan de fermetures multiples du virage vers la médecine et la chirurgie ambulatoire, nous avons même fermés des lits de réanimation, sans que personne ne puisse inventer la réanimation ambulatoire de remplacement… Notre taux de respirateurs disponibles par million d’habitants est ainsi devenu la moitié du taux de nos voisins d’outre-Rhin.

Des médecins et soignants courageux continueront à se battre dans l’adversité pour leurs malades quoiqu’il arrive. Comme en 40. Réussiront ils mieux ?

 

 

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