Chronique du 1er mars 2019
Sur les ondes de RCF:
Tous les vendredis soir, il est fidèle au poste avec sa chronique d’actualité, j’ai le plaisir d’accueillir par téléphone ce soir JC. Jacques bonjour.
Bonjour.
Vous allez nous parler ce soir du retour des djihadistes, que faire de traîtres bien de chez nous ? C’est le titre que vous avez choisi pour cette chronique, puisqu’on le sait, on en a entendu parler, la France va ramener ses djihadistes, femmes et enfants dans ses terres, dans l’hexagone.
En effet, nous aurons le retour des djihadistes après la fin de la liquidation de la dernière poche. En fait on en avait déjà tout un stock pris par les Kurdes ou les Irakiens. C’est un peu le sparadrap du Capitaine Haddock parce qu’on aurait pu y penser avant, que l’on n’a pas traité la question quand il était urgent de la régler et que maintenant on doit solder une situation tardive, qui donc pose un certain nombre de problèmes.

Un Niqab francophone…
Alors les États-Unis nous refilent deux charters. Il est amusant de voir qu’ils sont censés récupérer les leurs, mais qu’ils ne veulent pas. En revanche, ils insistent lourdement pour qu’on prenne les nôtres. L’opinion publique française est absolument contre. Les politiques essayent bien évidemment de jouer au ballon prisonnier. Ou de refiler le problème, mais on arrive à la fin du compte où il va falloir solder. On en a soldé quelques-uns aux Irakiens en prétendant à un appareil d’Etat et des procès équitables, ce qui est un folklore, mais qui de toute façon n’était pas réellement la question. Et les autres, les Kurdes vont nous en rendre un gros paquet, mais ils vont probablement en garder quelques-uns quand même puisque tout ça, c’est du marchandage.
Auparavant, on aurait pu se poser la question parce que si le titre que j’ai choisi parle de traîtres bien de chez nous, c’est parce que le Code Pénal français prévoit la trahison. Il prévoit la trahison, il prévoit tout un tas de peines et d’ailleurs il prévoit les trahisons individuelles et pas seulement l’acte de rejoindre un groupe terroriste. Parce qu’un certain nombre d’actions terroristes ont eu lieu de façon individuelle et que c’est un peu dur d’être une organisation terroriste à soi tout seul d’un point de vue juridique.
Et puis donc, nous avons la possibilité de déchoir des gens de la nationalité française qu’ils soient doubles nationaux ou pas du tout. Parce que le traité sur l’apatridie comporte des exceptions qui ont été activées par différents pays, dont la France en 1961, le général de Gaulle y a pensé. L’Autriche également a prévu que quiconque prendrait les armes contre sa patrie serait déchu. La Grande-Bretagne aussi, d’ailleurs on en a un exemple, la Grande-Bretagne se refuse au retour, je crois, d’une djihadiste célèbre en s’appuyant sur le fait que rien n’empêche d’utiliser les exceptions du traité pour créer, non par grandes séries, mais au cas par cas pour réaliser la déchéance de nationalité pour des nationaux qui n’ont pas d’autres patries de rattachement.
Quelque part JC, on peut dire que la France qui est face à ses responsabilités prend les devants et cela, elle l’accepte quelque part. Vous avez parlé de déchéance pour tous, qu’est-ce que cela veut dire concrètement ?
Ça veut dire que la loi permet en France de déchoir quelqu’un de sa nationalité avec une garantie juridique, parce que ça doit passer non seulement au conseil des ministres qui n’est pas une instance juridique, mais ça doit ensuite passer au Conseil d’Etat. On pourrait très bien prévoir, on aurait dû prévoir – parce que nous ne prenons pas d’avance nous sommes en retard – de les prévenir qu’il y aura une audience à telle date, vous rentrez ou vous vous faites représenter, sinon c’est le dernier avertissement et après à deux mois de la première annonce, vous êtes déchus de votre nationalité. Et vous êtes donc des combattants non Français qu’on a le droit d’abattre s’ils présentent un danger pour notre pays et ses intérêts.
Malheureusement, on n’a pas fait cela ! On est rentré dans un débat complètement tordu sur la déchéance des binationaux. Quelque chose de complètement incohérent. D’ailleurs on voit que les deux derniers ( les deux frangins qui se sont fait taper par une frappe aérienne ) étaient tout ce qu’il y a de plus breton. Donc on n’est pas en avance, au contraire. Pendant un certain temps on a un peu triché, c’est-à-dire que les aviateurs Français ont tordu le nez devant l’idée d’abattre des citoyens Français sans jugement. Ce qui est tout à fait à leur honneur. Alors on a triché en prenant une solution avec les Américains, avec les États-Unis, qui est qu’on s’est mis à abattre leurs ressortissants et eux nous rendaient service en abattant les nôtres. Ce n’est pas tout à fait d’une grande clarté juridique. La déchéance pour tous était une solution beaucoup plus efficace. D’autre part pour ceux qui sont pris sur le territoire Français, on peut les juger pour trahison, ce qui permet de les mettre une bonne trentaine d’années à l’abri.
JC vous l’avez dit, c’est un petit peu le rapatriement djihadiste femmes, enfants, tout le monde. Alors les enfants c’est un petit peu un cas à part, parce qu’ils sont nés là-bas, finalement ils n’ont pas choisi, eux, de naître dans des circonstances telles, j’ai envie de dire !
Ce n’est pas seulement qu’ils n’ont pas choisi : juridiquement il y a deux situations, ou ils sont nés en France et ils sont Français par le sol, ou ils sont nés de parents Français à l’étranger, et ils sont Français également. Donc les enfants sont tous Français et donc la République protège ses enfants, quels que soient leurs parents, donc elle doit les rapatrier.
Est-ce que c’est un danger de voir rapatrier ces enfants-là parce qu’on sait que souvent pour les enfants, très jeunes, le contexte social joue beaucoup, etc… Est-ce que cela demande que ces enfants soient suivis, en tout cas, lorsqu’ils reviennent en France ?
Il est évident que d’abord s’ils reviennent comme orphelins, ils seront par définition suivis. S’ils reviennent comme enfants de gens qui seront en taule, ils seront forcément également suivis. Donc il est évident qu’il ne s’agit pas de laisser ces enfants à la dérive. Et pour le long terme, tout dépend de l’évolution globale de la situation et donc de l’attractivité et de la force de notre cohésion nationale, de notre République.
JC, est-ce que cette situation risque de se poursuivre, de continuer parce que là on parle des premiers retours en France, mais est-ce que la France va être confrontée davantage à cette problématique dans les mois, dans les années à venir ?
Le problème auquel nous sommes confrontés, c’est un mouvement islamiste à volonté hégémonique et insurrectionnelle qui à deux composantes : une composante dite djihadiste, c’est-à-dire des extrémistes violents avec des attentats sans grande portée, mais spectaculaires, et donc qui dressent la population contre la communauté dont ils sont issus.
Dans le même temps les frères musulmans essayent de structurer comme communauté à part de la communauté nationale, l’immigration issue des pays arabes. Ils essayent de créer des « zones libérées ». C’est une vieille tactique insurrectionnelle, là il ne faut pas de vagues, il ne faut pas de violence, il faut simplement faire en sorte que les lois de la République soient de plus en plus difficiles à appliquer et qu’ils puissent appliquer la leur, c’est-à-dire l’oppression de la femme comme on le voit facilement et couramment, et tout un tas d’autres choses. Donc de créer des zones libérées hors du droit Français et cela on ne doit pas le tolérer.
Là aussi nous traînons, nous trichons et nous ne voulons pas regarder. Mais ne voulant pas regarder, nous aurons à traiter un problème bien plus vaste quand nous serons obligés non plus de nous confronter à 60 000 excités, comme c’était le cas lors des attentats de Charlie Hebdo, mais à des « zones libérées » qui dépassent déjà largement 600 000 personnes et qui ne peuvent que croître si on laisse faire.
JC, aujourd’hui on est un peu pris par le temps, mais ce que je vous propose c’est de faire le point sur cette situation, on verra de toute façon l’évolution, comment va se passer ce retour des djihadistes femmes et enfants, notamment du côté de la France. Merci d’avoir été avec nous JC ce vendredi pour nous présenter ce retour de djihadiste, que faire de traîtres bien de chez nous ? C’est le titre de votre chronique. À très bientôt JC.
À très bientôt, bonne journée.
La déchéance pour tous:
Punir la trahison:
https://jhmcohen.com/2016/09/17/fiches-s-la-loi-prevoit-tout/
L’enjeu stratégique:
https://jhmcohen.com/2015/01/29/insurrection-et-contre-insurrection-en-france/