Vaccins RNA : le Korsakoff du système immunitaire

Jacques HM Cohen 7 7 2022

Sur les ondes de RCF: LIEN @ en attente

Avec nous par téléphone, on retrouve le professeur Jacques COHEN pour sa chronique d’actualité, la dernière de la saison. Professeur, bonjour !

Bonjour !

Rien de bien original pour cette dernière chronique de la saison, on va parler de la Covid-19 alors que l’on commence à évoquer une septième vague. JC, quelle photographie de la Covid-19 peut-on faire en France en ce début juillet ?

On peut déjà en parler avec des choses originales, mais pas seulement de la septième vague qui est en train de monter, qui s’est emballée au 1er juillet, qui va culminer probablement autour du 15 juillet ou du 21, qui comporte moins de formes graves que la maladie initiale. Mais comme elle va concerner énormément de monde, finalement, elle va donner un certain nombre de cas hospitalisés et donc une mortalité indiscutable. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’elle se moque des vaccins et des immunisations, c’est-à-dire aussi des infections antérieures. Comme elle est très contagieuse et que l’on n’a pris strictement aucune mesure en disant « on s’en fout » ou à peu près, tout le monde va l’avoir. On va avoir une épidémie expérimentale pure dans une population non protégée et ne se protégeant pas.

Il va donc y avoir énormément de cas, ce qui est déjà bien entamé et statistiquement, même si elle est par fraction moins grave, elle va donner en valeur absolue un nombre très significatif de patients sérieux. Donc cela, c’est du côté de l’épidémie, à noter d’ailleurs que le Paxlovid®, le seul médicament disponible d’action anti virale, continue à être très largement sous-prescrit, parce qu’il reste prescrit dans le contexte de sa validation, c’est-à-dire des gens n’ayant pas besoin d’oxygène et vus immédiatement et en le donnant que 5 jours. C’était très bien pour valider qu’il marchait, mais ce n’est pas du tout l’indication où il faudrait le donner au point de vue thérapeutique. Il faudrait, bien sûr, le donner aux gens qui ont besoin d’oxygène, mais il faut le donner plus de 5 jours puisqu’il y a souvent un rebond à l’arrêt du Paxlovid®. Donc là, nous avons une arme, mais nous l’employons très mal. Voilà, c’est un des éléments sur lesquels je suis un peu désabusé.

Alors la vaccination ?

Alors, ce qui est intéressant, c’est la question des vaccins. Faut-il faire un rappel ? Lequel ? Pour déterminer cela, la première chose à voir c’est ce que l’on sait maintenant sur la durée d’efficacité de la vaccination. Là-dessus, outre l’étude israélienne du vaccin Pfizer, on a deux études récentes. Une étude chinoise sur la question du rappel et on s’aperçoit que l’espacement des rappels est important. Ce n’est pas en faisant des rappels très vite qu’on obtient une bonne réponse. Ceci est déjà un élément sur la cinétique, surtout pour les gens qui ont reçu d’abord un vaccin tué, ce qui n’est pas le cas en France, mais cela rappelle des choses que l’on connaît pour d’autres maladies. S’être précipité pour faire pour tous les vaccins deux doses à trois semaines n’est certainement pas l’idéal. Le rappel arrivait quand on pouvait, il vaut beaucoup mieux faire trois injections initiales à un mois d’intervalle, puis un rappel entre six mois et un an, ce qui était connu pour d’autres maladies infectieuses, mais ce qui se confirme pour le Sars Cov 2.

L’autre étude est beaucoup plus étrange, elle concerne la durée d’action des vaccins RNA. C’est une étude en vraie population, ici au Quatar, sur une population importante – je crois qu’il y a là 1,3 million de vaccinés et 350 000 rappels – et ce que l’on remarque, pour ne pas perdre trop de temps dans une chronique limitée, c’est que la vaccination RNA est à la fois extrêmement efficace et qu’elle est d’action extrêmement brève. A six mois, il ne reste rien.

C’est un peu contradictoire, tout ça.

Exactement parce que la caractéristique principale du système immunitaire c’est sa mémoire, c’est même là-dessus que l’on a découvert son existence, c’est parce qu’il se souvient de ce que l’individu a déjà rencontré. Mais là, il oublie. Il oublie comme un syndrome de Korsakoff en quelque sorte.

Korsakoff, JC, je ne suis pas sûr que cela parle à tout le monde. Est-ce que vous pouvez nous éclairer un petit peu ?

Oui ! Il ne s’agit pas de l’artiste hollandaise qui a pris ce pseudonyme !  Le syndrome de Korsakoff ou « oubli à mesure » est un trouble de la mémoire, qui se voit essentiellement chez les alcooliques ou dans de rares carences vitaminiques, et qui consiste à avoir une vie courante et des éléments de dégradation intellectuelle très limités sauf sur un segment bien précis, c’est d’oublier au fur et à mesure ce que l’on vient de faire, la mémoire ancienne étant à peu près préservée. La mémoire récente n’imprime plus pour prendre un terme moderne.  Korsakoff est un neuropsychiatre neurologue russe à la fin du XIXe et il a publié en français. Je mettrais sur le blog l’article princeps correspondant.

Sergey_Korsakov (1)

Sergey S Korsakoff ( graphie moderne Korsakov ) décrivit la perte sélective de la mémoire immédiate avec oubli à mesure. Où il est frappant, c’est une digression, de voir la qualité du relevé clinique contraster avec les tentatives d’explications physiopathologiques infondées. On pourrait en dire autant des nôtres. A ceci près qu’on n’a plus de relevé clinique le plus souvent. Donc pas de comparaison !

Portrait-de-S-S-Korsakoff-dans-les-annees-1890_W640

S S Korsakoff quelques années plus tard. Il mourra à 46 ans.  C° Hélène Beaunieux

Le blog jhm.com !

Absolument. Pourquoi dire qu’il s’agit d’un syndrome de Korsakoff du système immunitaire? Par analogie bien sûr! Cette curiosité d’oubli à mesure oblige à se poser la question : est-ce bien par l’effet des anticorps qui sont produits et de leur persistance ou pas, ou même des cellules de mémoire, qu’agit le vaccin RNA ?

Mon hypothèse est qu’une bonne partie de l’action des vaccins RNA est liée à leur effet adjuvant. Il n’y a pas d’adjuvant dans les vaccins RNA, si ce n’est eux-mêmes, c’est-à-dire le RNA lui-même et les lipides utilisés pour l’emballer qui ont un effet adjuvant. Un adjuvant, je vous rappelle, c’est quelque chose qui stimule la réponse immune de façon non spécifique d’antigène, c’est-à-dire que vous avez peut-être été immunisé avec un autre antigène ou vous ne mettez pas d’antigène du tout, mais que cette substance exacerbe l’efficacité de la réponse immune ou des réponses immunes. Donc, cet effet adjuvant non spécifique d’un agent infectieux donné n’est sans doute pas négligeable parce que lui, on sait qu’il a une action relativement limitée dans le temps et donc, ce serait une explication assez raisonnable, mais qui n’est pas encore prouvée, de ce Korsakoff du système immunitaire auquel on administre des vaccins RNA qui conduisent à une stimulation rapide, intense, efficace, mais brève du système immunitaire de telle sorte que la protection ne dure pas longtemps. Alors, vous allez me dire pourquoi je vous ai raconté tout ça: parce que nous allons avoir la question du 4e ou du 5e rappel.

Cette question, elle se pose déjà pour le 4e rappel, JC.

Bien sûr. Pour le 4e rappel, on ne dispose que de vaccins vis-à-vis de la souche initiale et d’ici deux ou trois mois à peu près, en septembre, on devrait disposer d’un vaccin contre une souche initiale et une souche récente, mais un Omicron de base, pas l’Omicron BA4 ou BA5 que l’on a actuellement, c’est-à-dire le vaccin qui court en retard. Alors, c’est peut-être quand même utile puisque comme je viens de vous le dire, si c’est l’effet adjuvant, à la limite, peu importe que l’on ait la bonne souche dans le vaccin puisque c’est la stimulation, l’effet coup de fouet qui est efficace ou qui pourrait être efficace, mais peu de temps, très peu de temps. Donc le point critique va être : quand faut-il faire ce rappel et quand faudra-t-il fait le suivant ? Actuellement, si vous avez été malade il y a quelques semaines à peine, vous êtes peut-être encore en partie protégé contre les formes graves, mais comme on le voit actuellement, des gens qui ont été malades il y a trois mois refont des formes relativement sérieuses donc cette protection, comme je vous l’ai dit, n’est pas très durable. Mais c’est la seule dont on dispose, donc il faut toujours l’utiliser, sauf peut-être chez les hommes jeunes entre 12 et 35 ans, c’est-à-dire tant que l’on fabrique beaucoup de muscle et beaucoup d’hormones mâles, puisqu’il semble que ce soit le paramètre qui détermine les myocardites induites par les vaccins RNA.

JC, vous nous avez éclairés sur les vaccins et les rappels, il va être bientôt l’heure de nous quitter dans cette chronique d’actualité. JC, quels sont finalement vos bons conseils pour l’été pour essayer de lutter, résister et ne pas avoir à affronter la Covid-19, tout simplement les mesures de précautions ?

Les mesures de précautions ce sont les mesures de distanciation sociale qui devraient être prises par tous pour protéger les plus fragiles par solidarité, ce qui n’est loin d’être le cas actuellement, mais qui au moins peut vous protéger un petit peu vous-même si vous portez un masque, si vous vous lavez les mains dès que vous avez touché quoi que ce soit et si vous évitez les lieux de rassemblement et d’échanges de populations, surtout s’ils sont confinés.

Merci pour tous ces bons conseils, JC. On invite nos auditeurs à vous suivre tout au long de l’été. Peut-être que vous allez prendre aussi un petit peu de vacances, mais on peut vous retrouver sur votre blog jhmcohen.com avec cette chronique et bien d’autres, les meilleurs moments de l’année et tout ce que vous nous avez raconté à travers l’actualité que vous avez décryptée avec nous, JC. On vous donne rendez-vous à la rentrée !

À très bientôt ! Bonnes vacances à vous !

Merci, JC, à bientôt Professeur !

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s