Covid-19, 8e vague : qui vacciner ?

Jacques HM Cohen 22 09 2022

Sur les ondes de RCF: LIEN

Avec nous par téléphone pour la chronique d’actualité, on retrouve le Professeur Jacques Cohen. Bonjour Professeur !

Bonjour Alexis !

Aujourd’hui dans l’actualité vous voulez nous parler de la Covid-19, 8e vague : qui vacciner ? C’est le titre de votre chronique. D’abord peut-être faire une photographie de ce qu’il se passe actuellement avec la Covid-19, un virus qui est toujours dans l’air si j’ose dire.

Dans l’air et chez les patients, hélas ! On a le démarrage d’une vague et nous avons encore une assez grosse incertitude pour savoir si cette vague va être d’une montée extrêmement rapide et donc relativement brève, ou si au contraire elle va monter lentement. Dans les vagues précédentes, on a eu les 2 styles et on ne peut pas encore l’affirmer sur le début de la montée actuelle. Les autres éléments que l’on ne peut pas affirmer c’est le niveau de gravité et le variant qui va l’emporter pendant cette vague.

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Combien de vagues? ou serait-ce de la houle…. ( Ifremer° )

Il se peut que ce soit une vague brève et à ce moment-là, il n’y a qu’un seul variant, mais il se peut que ce soit une vague longue comme nous avons eu sur la fin de l’année précédente et le début de celle-ci où plusieurs variants se sont succédé. Cela, on ne le sait pas encore, nous sommes donc obligés de gérer une assez grande incertitude. La seule certitude qui culmine c’est le fait que nous ne sommes pas certains de la gravité actuelle de cette vague et de sa gravité future. Il n’est pas sûr du tout que si des variants se succèdent, ils soient tous de plus en plus bénins. Sur le très long terme, c’est vrai, mais à court terme, on peut avoir des dents-de-scie tout à fait gênantes. Donc là, nous devons faire avec, et en plus, ces nouveaux variants rendent complètement inefficaces les thérapeutiques par anticorps et du point de vue des médicaments, on peut reconnaître qu’il n’y a pas de gros progrès ou de gros effort faits pour diffuser le médicament qui fonctionne à peu près, qui devrait marcher, lui, quels que soient les variants et que ses congénères, les autres médicaments en développement, eux aussi ne sont pas sensibles aux variants sur le Spike. J’attends donc avec impatience des progrès en matière de médicaments, ce qui serait peut-être finalement une meilleure solution que de courir derrière l’épidémie avec des vaccins qui sont forcément destinés aux virus de la ou des vagues précédentes.

J’allais dire justement, JC, si on n’a pas de médicament, la seule solution c’est le vaccin. Où en est-on ? Parce qu’on imagine quand même que depuis la Covid-19, c’est-à-dire 2019, on a réussi à développer des choses avec plus ou moins des certitudes.

Il nous reste encore beaucoup d’incertitudes d’abord parce que ce que l’on a développé de façon un peu miraculeuse, ce sont des vaccins qui ne marchent pas longtemps. C’était une bonne surprise qui devient une mauvaise surprise. D’une part, ils ne marchent pas longtemps et d’autre part, leur action sur les variants successifs est variable et parfois nulle ou du moins parfois faible. Le faible n’est pas nul d’ailleurs parce qu’une bonne partie de l’action de ces vaccins dans la vraie vie parait meilleure pour éviter les formes graves que ce que ne prédiraient les tests in vitro, l’étude des anticorps, des cellules, etc. Tout cela parce qu’à mon avis, une bonne partie de l’effet de ces vaccins nouveaux RNA est lié à leur capacité auto-adjuvante. Et on voit que d’autres adjuvants dans des vaccins plus classiques peuvent aussi avoir un effet. Il y a eu une étude disant que les personnels de santé vaccinés contre la grippe – vous voyez que j’y viens aussi puisque la campagne va s’ouvrir – faisaient moins de formes graves.

Après il y a la question des différents types de vaccins. Il n’y a pas que les vaccins RNA dans le monde, mais chez nous, il n’y a que ça pour un préjugé idéologique un peu désagréable. En effet, si les vaccins adénovirus – qu’ils soient Anglais, Russes ou Belges (puisque Johnson et Johnson est en fait Jansen qui est Belge) – buttent sur les complications graves de thromboses qui sont spectaculaires et qui ont tué ces vaccins même si par rapport à la maladie, leur mortalité est extrêmement faible, donc si on évite les adénovirus, il reste les vaccins à virus entier tué. C’est la solution choisie par les Chinois, par les Indiens et en France par VALNEVA. Par une espèce d’a priori qui est de vouloir dire du mal des Chinois, on ne veut pas s’intéresser à ces vaccins qui marchent un peu moins bien que les vaccins RNA quand ils visent la souche exacte de vaccination, mais qui marchent quand même sur les autres souches. Quand on voit dans la vraie vie, par exemple en Amérique du sud où au Chili il y a une étude de très grande taille avec un vaccin chinois à virus entier qui montre une très bonne protection contre les formes graves – parce que je pense que c’est l’effet adjuvant qui est aussi un élément non négligeable – on aurait pu en faire autant avec VALNEVA, cela nous éviterait les inconvénients des vaccins RNA chez les hommes jeunes avec les myocardites. Mais on ne l’a pas fait pour des préjugés qui me paraissent des considérations non scientifiques, mais géopolitiques parait-il. Donc nous avons 3 vaccins RNA pour 2 marques. En effet, Pfizer-BioNTech a développé 2 variants à 2 composantes selon ce qui pourrait être le plus proche de la souche qui va se développer et qui va faire l’épidémie. Moderna a parié sur une seule souche. Là, ce qui est amusant c’est que l’on va diffuser les 3 en disant aux gens « comme tu veux, tu choisis », sans paramètre bien précis pour savoir s’il vaut mieux prendre Pfizer 1 ou Pfizer 2, on verra bien. En plus, tout cela va être uniquement à partir du 18 octobre. En fait, si la vague est relativement rapide, ce qui est une des 2 hypothèses, cela voudrait dire qu’il faudrait dès maintenant faire des vaccinations en vaccin primitif, c’est-à-dire pas à 2 composantes, parce que l’on va arriver trop tard avec le vaccin à 2 composantes et au moins pour les personnes très âgées, cela me parait être ce qu’il faudrait faire si dès la semaine prochaine on voit que la vague monte beaucoup, parce que je vous rappelle qu’il ne suffit pas d’immuniser, il faut quand même encore une semaine ou 2 pour que cela marche. Nous sommes avec beaucoup de flous et je pense qu’il va falloir vacciner tous les sujets à risques, toutes les personnes âgées dans mon genre et tous les sujets plus jeunes ayant des facteurs de risques (diabète, obésité, trisomiques, immunodéprimés etc.).

En revanche, on sait que ces vaccins, que ce soit le mono ou le divalent, n’empêchent pas la circulation du virus puisqu’ils ne bloquent pas son installation sur les muqueuses, mais sa diffusion au-delà. Donc une vaccination de toute la population ayant comme optique d’empêcher la circulation virale parait illusoire et contre-productive chez les hommes jeunes, de la puberté à 12 ans jusque 30 ans puisque c’est là où l’on a un taux de myocardites qui n’est pas négligeable.

Personnellement, je serais pour ne pas vacciner en RNA les jeunes hommes, pour vacciner tous les sujets à risques en vaccin bivalent, ainsi que les personnes âgées dès maintenant en vaccin monovalent si dans 8 jours on voit que la montée de la vague est relativement rapide. En effet, pour l’instant, ce que l’on a observé c’est que l’on a une situation qui ressemble beaucoup à l’année précédente c’est-à-dire que ce virus tue les sujets fragiles qui ont déjà des problèmes médicaux et ne tue pas trop en dehors. Donc on est dans une situation relativement favorable, à condition de s’occuper d’eux sérieusement et de faire ce rappel de vaccin afin que les populations les plus vulnérables soient protégées, que ce soit par l’immunisation classique du vaccin ou par l’effet adjuvant de stimulation immunitaire que ces vaccins réalisent.

JC, vous étiez pile dans les temps, mais je vous pose quand même une question qui peut inquiéter la population : est-ce que tous ces rappels de vaccins ne peuvent pas aussi avoir un impact ou des effets secondaires à long terme si on en fait de façon trop récurrente ?

Si c’étaient des vaccins qui marchent bien et que l’on ait des réponses de plus en plus fortes, la question se poserait, l’ennui c’est que cela ne marche pas bien. On sait que ces vaccins ont des durées d’efficacité relativement faibles, c’est pour cela que l’on fait des rappels sans arrêt. Donc on n’en est pas à avoir des vaccins qui puissent donner des maladies par excès de stimulation puisque de toute façon, ils ne marchent pas bien. On peut donc de ce point de vue être relativement rassurants. Les effets à long terme, évidemment, on ne peut jamais garantir le long terme puisqu’on n’y est pas. Mais on n’a pas d’exemple en vaccinologie de complications qui soient à plus de 6 mois. Là, on a un recul pour dire que l’un dans l’autre, les effets secondaires sont moins graves que la maladie elle-même sur les populations à risques. Pour une population générale qui ne risque rien, évidemment, ce n’est peut-être pas une idée géniale que de vacciner les enfants ou les jeunes adultes, surtout mâles puisque les myocardites sont 4 ou 5 fois plus fréquentes chez les garçons que chez les filles.

Merci, JC, de nous avoir éclairés et on vous dit à la semaine prochaine !

À bientôt !

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